Avec ses façades ondulantes en béton, il participe pleinement à la requalification du quartier Louvois, en pleine restructuration.
Encerclé par une série de tours de logements construites dans les années 70, l’espace Jean-Lucien Vazeille vient remplacer le centre Pajol, désamianté et démoli en 2016. À vocation sportive, culturelle et associative, il invite la modernité et l’innovation au cœur d’un quartier qui change progressivement de visage avec, notamment, la démolition d’une dalle de 20 000 m2 permettant de faire entrer la forêt voisine dans la ville en créant un parc paysager. Dans cet environnement en mutation, le nouvel espace pluridisciplinaire se dévoile par bribes et interpelle le regard tant on est attiré par l’apparition intermittente de ses courbes de béton gris clair.
Une architecture en mouvement
Les façades se dévoilent partiellement, au gré des perspectives, et annoncent la présence d’une matière mouvante et dense qui exprime pleinement la présence d’un équipement public dédié au sport. Judicieusement placé au cœur du quartier, il fonctionne comme un centre névralgique dont les mouvements de façade expriment les vibrations des activités sportives qui s’y déroulent.
L’une des idées fortes du projet fut la création d’un bâtiment à deux visages. Il se compose d’un rez-de-chaussée transparent qui donne à voir ce qui se passe dans l’entrée et dans la grande salle multisport semi-enterrée, alors que la partie supérieure se révèle opaque et mystérieuse. Le socle, ouvert visuellement, offre aux piétons une vue plongeante sur les corps en mouvement et contraste avec les grands voiles sinueux qui habillent les étages, à la manière d’un paravent qui ondule et protège. L’ensemble se démarque également par sa hauteur, une douzaine de mètres, qui rompt avec celle des immeubles voisins bien plus élevés – un changement d’échelle mis en valeur par une marge de recul de 5 m qui entoure le bâtiment et permet de l’installer dans un écrin de verdure.
L’inscription dans le site et la silhouette du centre ne sont pas ses seuls points forts. Le parti le plus étonnant réside sans doute dans la création d’un grand atrium autour duquel le projet s’organise. Une rampe elliptique s’y déploie. Elle s’enroule pour desservir les différents étages, les relier, fluidifier les déplacements et faciliter le repérage, les différentes fonctions étant réparties par niveaux. Emprunter cette rampe relève de la promenade architecturale. On découvre au fil de ses pas les différentes activités du bâtiment grâce aux larges fenêtres ménagées dans les salles et ouvertes sur ce grand espace central.
La fluidité de l’organisation
Surmonté d’une verrière, l’atrium est baigné de lumière, le quatrième point fort du projet. Où que l’on soit, on profite d’un éclairement naturel, excepté les vestiaires et les locaux techniques. Les façades des étages supérieurs étant très peu percées, les différentes salles sont éclairées par des puits de lumière qui diffusent un éclairage homogène sans ensoleillement direct. Un autre des challenges consistait à créer deux parcours parallèles « pieds propres » et « pieds sales » sans complexifier la lisibilité des cheminements dans le bâtiment. Les utilisateurs accèdent directement dans les salles depuis les vestiaires sans avoir à passer par le parcours « public ». Pari réussi. Cette double circulation fonctionne parfaitement, en toute discrétion, dans une atmosphère apaisante et lumineuse grâce à la prédominance des courbes et du blanc, omniprésent – une teinte immaculée qui met particulièrement en valeur le caractère sculptural de la rampe hélicoïdale. Sa forme elliptique, variable à chaque niveau pour absorber les différences de hauteur sous plancher, a complexifié sa réalisation. Suspendue, sa structure métallique disparaît, masquée par l’habillage en staff des garde-corps, exécuté avec savoir-faire par une équipe de compagnons. Autre élément insoupçonné de la rampe, les 10 cm de plancher béton coulés pour stabiliser la structure métallique et la rendre circulable.
La rigueur au service de l’imaginaire
Et dans ce bâtiment, c’est loin d’être le seul rôle du béton. Si l’architecte Jean-Pierre Lott l’utilise de façon quasi systématique, la raison en est simple : « Les performances techniques de ce matériau moulé nous permettent de construire des dessins, de figurer des abstractions. Il est l’outil idéal de nos recherches esthétique. » Mais avant toute chose, il insiste sur la nécessité d’un travail collaboratif pour qu’une forme crayonnée voie le jour. En faisant dialoguer technique et conception architecturale dès le stade de l’esquisse, on peut imaginer « lancer un défi à la gravité » et créer un bâtiment composé d’un rez-de-chaussée vitré supportant un voile sinueux en béton légèrement ajouré. Pour y arriver, des solutions existent, nées d’un travail d’équipe. Ainsi, les presque 300 m de voiles courbes suspendus qui composent les façades des étages ont été coulés en place. Ils ont nécessité la mise en œuvre d’un étaiement hors norme pour créer, le temps du coulage et du séchage, une structure éphémère pouvant supporter les différents moules sur mesure nécessaires à la réalisation de toutes les ondulations. La base du bâtiment étant entièrement transparente, ces voiles sont tenus grâce à la mise en place de poutres précontraintes de 30 m de long. Également coulées en place, elles relèvent d’un ouvrage de type Génie Civil utilisant la technique de la post-tension pour obtenir le niveau requis de précontrainte permettant de supporter la charge supplémentaire due au poids des salles du dojo, situées au dernier étage sur la grande salle omnisports.
En touche finale, indispensable pour assurer la pérennité de « l’œuvre », une lasure. Légèrement teintée, elle protège les façades et éclaircit légèrement le béton tout en conservant l’effet brut et les aspérités du béton apparentes.
Chaque détail compte
En faisant le choix d’un béton bas carbone, le ton est donné, celui de réaliser l’espace Jean-Lucien Vazeille dans le cadre d’une démarche haute qualité environnementale (HQE). Pour atteindre cet objectif, la maîtrise d’œuvre a tiré parti de l’orientation du bâtiment et mis en œuvre un système de ventilation efficace mixant les systèmes simple et double flux en fonction des besoins spécifiques à chaque local, voire, dans certains cas, en ayant recours à la ventilation naturelle, qui utilise le déphasage nuit/jour et l’inertie du béton. Côté énergie, le réseau de chaleur est relié à la sous-station du réseau urbain située à proximité. Pour offrir aux riverains une jolie vue, la toiture est végétalisée et permet la rétention et le stockage des eaux de pluie. Au niveau de l’éclairage, la généralisation des puits de lumière permet d’éclairer naturellement une majorité des espaces. Les façades en béton étant très peu percées, elles protègent les salles d’un ensoleillement direct. L’encorbellement de l’étage fonctionne comme un large auvent empêchant les rayons du soleil de balayer les parois vitrées du rez-de-chaussée. Si l’ambiance lumineuse et le confort d’été sont parfaitement régulés, il en va de même pour le confort acoustique. L’atmosphère feutrée obtenue dans le grand atrium participe à la sensation de bien-être ressentie un peu partout dans le bâtiment.
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Fiche technique
Reportage photos : Takuji Shimmura
- Maître d’ouvrage : ville de Vélizy-Villacoublay
- Mandataire de l’opération : Citallios
- Maître d’œuvre : Jean-Pierre Lott
- BET TCE : Incet
- Acousticien : Acoustb
- Entreprise clos couvert/finition : CBC
- Surface : 9 000 m2 SHON
- Coût : 20 M€ HT
Programme : équipement public pluridisciplinaire à vocation sportive, culturelle et associative.