Quel maître d’ouvrage n’a pas rêvé de pouvoir commander puis réceptionner un ouvrage avec un niveau de service garanti, évitant ainsi, sur une période de durée de vie spécifiée, de faire face à de coûteuses réparations, problématiques vis-à-vis des contraintes d’exploitation et mal acceptées par les usagers ? L’approche performantielle peut y mener, et Didier BRAZILLIER, directeur de l’ingénierie DIR Centre-Est, fait part du point de vue de l'expert, en rappellant que efforts de rigueur dans la définition de leurs attentes de la part du maître d’ouvrage et de son maître d’œuvre restent indispensables.
Ne pas oublier les fondamentaux
Il convient de rappeler avec force que l’application de cette méthode ne permettra aucunement de s’affranchir d’un suivi régulier et d’un entretien courant normal au cours de la vie de l’ouvrage, pas plus que la mise de côté des normes habituelles sur les matériaux constitutifs du béton.
Afficher ses attentes et savoir s’entourer
Il convient d’exposer résolument et clairement, le plus en amont possible, le recours souhaité à ce type d’approche, ses exigences et la description de l’environnement précis dans lequel sera construit l’ouvrage.
Pour être précis, explicite et conforme au cadre des normes Eurocodes (voir guide SETRA « Application des Eurocodes par le maître d’ouvrage, le programme d’un OA aux Eurocodes » – février 2010 – Réf. 1002) et du guide « Application de l’approche performantielle du LCPC » , le maître d’ouvrage doit s’entourer d’un AMO ou d’un maître d’œuvre expérimenté dans ce domaine.
Cela est indispensable compte tenu de la technicité de la définition des données d’entrée qui doivent être pertinentes, adaptées à l’ouvrage et cohérentes entre elles pour éviter l’accumulation de prescriptions parfois contradictoires ou la multiplication des formules exigées pour chaque partie d’ouvrage sans plus-value.
Offrir les conditions de réussite et encourager l’innovation
La définition des indicateurs de durabilité pertinents et des seuils d’acceptation est particulièrement importante, car conditionnant l’économie générale des études. Le maître d’ouvrage veillera à donner du temps pour permettre les études formulation et la validation des épreuves de convenance, mais aussi pour que l’entreprise et son BPE puissent s’emparer de la souplesse offerte par l’approche performantielle pour optimiser les formules tant du point de vue économique qu’environnemental.
On aura d’ailleurs tout intérêt dans les pièces contractuelles à rechercher à valoriser cette optimisation (prime à des bétons à moindre impact environnemental ou prise en charge de plusieurs études de formulation par exemple) pour encourager à explorer cette voie, qui est fondamentale dans une logique de Développement Durable.
Donner du temps, cela peut passer par une information anticipée des acteurs (avant le lancement de l’appel d’offres) via l’affichage d’une politique générale du maître d’ouvrage, résolument tournée vers une analyse en coût global ou via un contact préalable avec les organismes professionnels...
Ou encore par le financement d’études sur des matériaux locaux pour simplifier le recueil de données, voire par le recours à des formulations locales types préalablement testées et validées... Il est important de souligner que cette approche ne se résume pas uniquement à un pari de la part du maître d’ouvrage basé sur un contrat moral lors de la conclusion du marché. Il pourra avec quelques essais réguliers sur les bétons de la structure s’assurer que le vieillissement constaté est conforme aux prédictions initiales du modèle et donc disposer de véritables témoins de durée de vie.
Un appui pour les gestionnaires...
C’est aussi grâce à ces modèles de simulation des dégradations et de vieillissement, comme exposé par ailleurs, que l’approche performantielle est également un outil puissant pour l’évaluation de la durée de vie résiduelle probable d’une structure existante ou la prédiction de l’évolution des dégradations du béton structurel, ce qui est extrêmement précieux et potentiellement source d’économie.
Avec la généralisation de la méthode et quelques retours d’expérience attendus, on s’oriente bien vers une petite révolution dans la gestion d’un patrimoine d’ouvrages d’art.