Organisme chargé par les pouvoirs publics de mieux connaître la pollution intérieure, ses origines et ses dangers, travaillant en liaison étroite avec l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), l’Observatoire de la Qualité de l’air intérieur (OQAI) a mené entre 2003 et 2005 des mesures de qualité de l’air dans près de 600 résidences principales réparties sur 50 départements différents.
Le constat est sans appel : « la pollution de l’air est plus élevée à l’intérieur qu’à l’extérieur des logements ». Sachant que nous passons environ 16 heures par jour en moyenne dans nos logements (ce temps est estimé, en moyenne, à plus de 17 heures par jour pour un enfant de moins de 4 ans), les résultats de cette étude nationale sont précieux.
Cette campagne, de par son ampleur, a permis de livrer une radiographie de la qualité de l’air intérieur en France. Elle montre des niveaux similaires à ceux déjà mis en évidence par des enquêtes internationales de grande envergure. Presque la moitié des logements présentent des niveaux de concentration très faibles pour l’ensemble des polluants mesurés, mais dans près d’un logement sur dix les concentrations de plusieurs COV se révèlent très élevées. Aussi, selon le polluant, de 5 à 30 % de logements présentent des valeurs nettement plus élevées que les concentrations - moyennes relevées dans l’ensemble du parc.
Benzène et formaldéhyde, des concentrations croissantes dans nos logements
La médiane des concentrations mesurées en benzène, est de 2,1 µg/m3 ; 5 % des logements mesurés présentent une concentration supérieure à 7 µg/m3, valeur préoccupante si on la compare aux valeurs-guides de 2 µg/m³ actuellement applicables depuis le 1er janvier 2016, établies par le décret pour les établissements recevant du public, pour une exposition de longue durée. Le rapport de l’OQAI précise que, dans une maison individuelle, la présence d’un garage communicant avec le logement augmente le niveau de benzène, du fait des émissions provenant des gaz d’échappements et des produits de bricolage pouvant y être stockés.
Le formaldéhyde est le composé dont la médiane des concentrations mesurées est la plus élevée. L’OQAI observe que les niveaux les plus hauts se situent dans les logements construits après les années quatre-vingt-dix, ainsi que dans ceux présentant des panneaux de particules utilisés pour la décoration. 5 % de ces logements présentent une concentration supérieure à 46,6 µg/m3. Cette valeur est supérieure à la valeur guide de 30 µg/m3 définie par le décret n° 2011-1727 du 2 décembre 2011.
Styrène et acétaldéhyde, des molécules moins préoccupantes
La médiane des concentrations mesurées en styrène est de 1 µg/m3. 5 % des logements présentent une concentration supérieure à 2,7 µg/m3.
La médiane des concentrations mesurées en acétaldéhyde est de 11,6 µg/m3. 5 % des logements présentent une concentration supérieure à 30 µg/m3.
Ces valeurs sont nettement inférieures à la concentration limite d’intérêt du styrène de 250 µg/m3 et à la VGAI définie par l’ANSES pour l’acétaldéhyde de 160 µg/m3. Toutefois, l’absence d’études toxicologiques récentes sur ce dernier composé nous oblige à rester vigilants quant à sa présence dans nos logements.
Des ventilations en mal d’entretien
L’enquête nationale de l’OQAI pointe également le manque de fiabilité de nos systèmes de ventilation en exploitation. Plus de la moitié des logements équipés de VMC visités par l’OQAI présentaient des débits totaux minimaux inférieurs aux valeurs de référence fixées dans les arrêtés du 24 mars 1982 et du 28 octobre 1983, relatifs à l’aération des logements.
Exiger un contrôle des débits
« Seulement 1 % des systèmes de ventilation est contrôlé à la réception. C’est pourquoi, tout comme il est désormais obligatoire d’attester du respect de la réglementation acoustique, il faut contraindre les installateurs à un contrôle des débits. »
Emmanuelle Brière, responsable ventilation et traitement d’air au sein du syndicat d’entreprises thermiques et aérauliques Uniclima.
Concilier performance énergétique et qualité de l’air
« La qualité de l’air des logements neufs RT 2012 est facilement maîtrisable. Néanmoins, si les résultats sont souvent bons à la réception du bâtiment, c’est une fois qu’il est meublé et occupé que les choses se gâtent… Dans le cadre du Plan national santé-environnement II, nous participons actuellement à un appel à projets lancé par l’ADEME, en lien et visant à tester une démarche qualité de l’air sur 20 maisons individuelles BBC de Rhône-Alpes. La livraison des résultats est prévue fin 2016.
[…] Les 500 000 logements que le gouvernement souhaite voir réhabilités énergétiquement chaque année ne devront pas simplement être couverts d’isolant et rendus étanches. Dans la feuille de route pour la transition écologique, il est d’ailleurs précisé que “le plan de rénovation thermique des logements s’accompagnera d’une vigilance particulière sur la qualité de l’air intérieur”. »
Claire-Sophie Coeudevez, ingénieur au sein du bureau d’études Medieco, spécialisé dans les problématiques de santé appliquées au bâtiment.
Enseignements sur la qualité de l’air des maisons basse consommation
Dans une étude CRC (Contrôle du respect des Règles de la Construction) de 2008 à 2011, Romuald Jobert a analysé les données issues des contrôles de 1 287 logements neufs. Sur l’ensemble des contrôles, 1 246 dysfonctionnements ont été relevés, dont 338 concernant les débits d’air extraits non conformes à la réglementation. Trois cent dysfonctionnements sont observés sur les entrées d’air, dont la moitié sont absentes dans une ou plusieurs pièces.
En 2018, un livre blanc de la ventilation a été publié pour répondre à une préoccupation commune des signataires sur la nécessité d’améliorer la qualité des installations de ventilation des bâtiments, afin de contribuer à offrir à nos concitoyens un environnement intérieur sain et confortable. Des réflexions communes ont été menées pour répondre à cette problématique. Le constat a été fait que l’existence de nombreux guides de bonnes pratiques n’a pas suffi à améliorer significativement la situation.
Aussi, les professionnels signataires du Livre Blanc ont proposé qu’une attestation de prise en compte de la réglementation sur l’aération soit mise en place pour les opérations de construction neuve et celles de rénovation lourde avec des installations de ventilation neuves.
Cette attestation de prise en compte de la réglementation sur l’aération, basée sur des vérifications visuelles et des mesures de débit sur les installations par échantillonnage suivant un référentiel qui reste à définir, pourrait être annexée à la Déclaration Attestant l’Achèvement et la Conformité des Travaux (DAACT).