Protégé derrière sa résille en béton préfabriqué, il complète un site universitaire en pleine restructuration et en modifie l’image.
Inscrit dans l’opération Campus initiée par le gouvernement en 2008 et qui avait pour objectif l’émergence en France de douze pôles universitaires d’excellence, le bâtiment H est emblématique du renouveau souhaité pour le campus Montaigne-Montesquieu.
Sa construction a marqué le début de la transformation de ce site universitaire. Le nouvel édifice vient avantageusement remplacer des éléments préfabriqués et vétustes, énergivores et peu confortables, pour offrir un équipement de qualité, respectueux de son environnement. Implanté en suivant l’alignement du plan originel du campus défini par l’architecte Louis Sainsaulieu, le bâtiment H vient s’insérer avec justesse, telle la pièce manquante d’un puzzle. Situé le long de la ligne B du tramway bordelais, à proximité de l’allée Ausone, il bénéficie, côté sud, d’un terrain boisé en cours d’aménagement. Conçu de manière à préserver au maximum les arbres existants, il présente une volumétrie séquencée en trois parties, dont le gabarit et la hauteur s’adaptent aux bâtiments voisins afin de créer un ensemble harmonieux, à échelle humaine.
Une écriture rigoureuse
Cette composition tripartite répond également aux besoins du programme en offrant une lisibilité et un fonctionnement indépendants à chaque pôle. Au centre, l’élément haut, la Maison de l’économie, se déploie sur quatre niveaux, pôle majeur par ses activités de recherche innovantes et son rayonnement géographique. À l’ouest, le volume en R+2 accueille les administrations et les espaces de formation. À l’est, les salles informatiques, le plateau VIA Inno et les locaux annexes forment la plus petite entité en R+1.
Toujours dans un souci d’intégration à l’environnement existant, l’écriture architecturale prend en compte les constructions déjà présentes en proposant des façades fonctionnelles au design ultra géométrique, qui font écho à la répétitivité des volumes alentour. Ce parti pris sobre et rationnel insuffle au bâtiment une image atemporelle. Ici, tout est question de fluidité et d’adaptabilité. Conçus dans une logique de pérennité, de confort et d’évolutivité, les volumes résultent de la multiplication d’une trame de 1,20 m, homogène dans l’ensemble du bâtiment. Cette modularité permet une réversibilité des usages si besoin, les relocalisations, les agrandissements ou d’éventuelles permutations – une mesure étalon qui s’affiche évidemment en façade. Elle définit la résille qui entoure le volume, constituée de lames de béton horizontales et verticales parfaitement orthonormées. Cet habillage offre une signature visuelle forte derrière laquelle se déploie une façade de type rideau filant devant les planchers. Les ouvertures sont calepinées selon la même trame, répondant là encore au souhait de l’adaptabilité.
Une fluidité dedans-dehors
À l’intérieur, les différents espaces s’articulent autour de trois patios répartis pour apporter de la lumière naturelle au cœur de chacun des volumes et éclairer les circulations qui s’enroulent autour de ces évidements. Les cloisons entre les bureaux et les couloirs comprennent un châssis vitré offrant un complément d’éclairage naturel et une transparence visuelle. L’ambiance intérieure qui en résulte est claire et lumineuse, accentuée par le choix de teintes claires pour les finitions intérieures. Outre leur apport en lumière naturelle, les patios offrent des échappées visuelles et une surface extérieure facile à investir par beau temps. S’ajoutent quelques terrasses extérieures pensées elles aussi comme des jardins d’agrément qui font écho au cadre paysager dans lequel s’inscrit le bâtiment.
Côté matériaux, le parti pris est celui de la mixité. Du béton, du métal, du verre et du bois. Le béton s’affiche de deux façons. À l’extérieur, il se montre pour former une résille protectrice qui fait fonction de tour d’ombre autour du bâtiment. Son épaisseur varie en fonction des besoins pour apporter une protection solaire efficace au sud, à l’est et à l’ouest. La mise en place de ce système de tour d’ombre a permis d’augmenter les surfaces vitrées et d’offrir un bâtiment à la fois ouvert et protégé.
Le souci du détail
En termes de mise en œuvre, si les lames de la résille béton ont été préfabriquées afin d’obtenir un quadrillage « parfait », la structure poteaux-poutres a été coulée en place, ainsi que les planchers et les parois pleines présentes sur les pignons est et ouest. La vraie difficulté consistait à harmoniser les teintes des bétons entre éléments préfabriqués et coulés en place, et de travailler avec suffisamment de précision pour faire coïncider les joints des banches avec ceux de la résille afin de donner la sensation visuelle d’une unité de matière.
Abritées derrière la tour d’ombre, les façades sont de type rideau, constituées d’un complexe filant devant les planchers béton. À ossature bois, elles intègrent une isolation par l’extérieur en laine de bois de forte densité soumise à un avis d’expérimentation sur le chantier et protégée par un capotage métal. Elles sont doublées côté intérieur d’une paroi béton qui renforce le degré d’isolation par son inertie. Le choix d’une façade « multicouche » offrant un fort déphasage thermique n’est qu’un des exemples exprimant la volonté de réaliser un bâtiment minimisant ses empreintes carbone et énergétique.
Un confort raisonné
En effet, le projet répond aux exigences de la certification NF HQE® Bâtiments tertiaires et du label Bâtiment Biosourcé niveau 1. Pour limiter les déperditions, l’édifice est compact, très isolé thermiquement et étanche à l’air (0,68), avec en prime des toitures végétalisées. Le système de chauffage est relié à la chaufferie centrale du campus. L’apport de chaleur se fait par le sol et le plafond, diffusé depuis la dalle béton structurelle transformée en dalle active. Ce système est complété par des panneaux rayonnants suspendus à la dalle. Une régulation indépendante par zones permet d’ajuster les besoins en fonction de la typologie des locaux et de leur orientation. Les conforts d’hiver et d’été sont renforcés par l’installation de brasseurs d’air dans les bureaux et les salles de classe, pour une meilleure répartition de l’air chaud en hiver et un abaissement de la température ressentie en été. Des vitrages à contrôle solaire et des persiennes métalliques orientables apportent un complément de protection permettant d’éviter l’installation d’une climatisation. Une ventilation double flux assure le traitement de l’air. L’eau de pluie est récupérée dans une grande cuve enterrée. Elle sert pour l’arrosage et les chasses d’eau. Elle permet également le rafraîchissement de l’amphithéâtre. Ce bâtiment démontre bien qu’il n’est pas nécessaire de mettre en place des systèmes extrêmement sophistiqués pour obtenir un résultat satisfaisant d’un point de vue environnemental. En revanche, chaque détail compte.
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Fiche technique
Reportage photos : © Jean-François Tremege
- Maître d’ouvrage : SRIA de l’université de Bordeaux
- Maître d’œuvre : Marjan Hessamfar & Joé Vérons, architectes associés mandataires
- BET TCE : TPF Ingénierie
- BET HQE® : 180° Ingénierie
- Acousticien : Emacoustic
- Entreprise gros œuvre : Roncarolo
- Préfabricant : Préfa Périgord
- Surface : 6 743 m2 SDP
- Coût : 12,8 M€ HT
Programme : 3 entités dont la Maison de l’économie, des espaces de recherche et de formation, les administrations des facultés de droit-sciences politiques et d’économie-gestion, et des espaces mutualisés à l’échelle du campus dont un amphithéâtre de 200 places.