Le gymnase et la Maison des services publics, édifiés sur une parcelle commune, symbolisent avec brio le renouveau d’un quartier en pleine mutation urbaine.
Équipements publics majeurs du quartier du Parc-aux-Lièvres, dans la ville nouvelle d’Évry-Courcouronnes, le gymnase François-Mauriac et la Maison des services publics Gisèle-Halimi (MSP) ont pu voir le jour grâce au nouveau programme de renouvellement urbain déployé sur le secteur (NPRU). Une large dalle et ses tours d’habitation ont été démolies, transformant les usages de la ville grâce à un sol retrouvé. Non loin de là, jouxtant les deux nouvelles constructions, le groupe scolaire La-Fontaine-Mauriac est en cours de réhabilitation. L’ensemble accompagne ainsi un mouvement de revalorisation du quartier et porte une dimension symbolique forte : celle de l’attention portée par la municipalité aux habitants.
Livrés à 24 mois d’intervalle, le gymnase et la MSP avaient fait l’objet de concours distincts, respectivement en 2017 et 2018. Tous deux furent remportés par l’architecte Christophe Gulizzi, reconnu pour son écriture poétique de béton : « Le jury avait apprécié la continuité des projets dans l’intention et la matérialité », explique le créateur. Partageant une même parcelle issue de la démolition d’un terrain de handball et d’un gymnase particulièrement vétustes, les nouvelles constructions dégagent une forte synergie : implantées en alignement, elles sont associées par un parvis piéton d’une largeur de 8 m. Partiellement abrité de la pluie et du soleil par chacun des bâtiments, ce lieu convivial à ciel ouvert fonctionne comme une place publique centrale.
Hercule de béton
Développant une puissante musculature de béton, le gymnase se présente comme un monolithe sculptural et massif. L’effet d’épaisseur est d’autant plus perceptible que chacune de ses façades est évidée par des découpes galbées qui sont comme taillées à la serpe. Complexes, ces entailles ne sont en rien un formalisme gratuit mais servent au mieux les usages de la construction et y introduisent un maximum de lumière naturelle : « La lumière est le matériau que j’utilise le plus », précise Christophe Gulizzi.
Côté parvis, une cavité génère un long mouvement qui accompagne et protège le visiteur, puis elle se retourne côté rue pour définir l’entrée. Cette dernière s’ouvre directement sur le grand hall, lequel canalise et distribue l’ensemble des flux, ceux du public et des sportifs. Dès lors, le plan organisé perpendiculairement autour d’un axe majeur permet de se repérer très facilement dans les lieux. Large de 2 m, il distribue de part et d’autre salles et vestiaires, ainsi que les deux noyaux de circulation verticale donnant accès au niveau supérieur où se trouvent la salle de danse, le dojo et les tribunes.
Ces dernières sont configurées de manière à rendre possible l’organisation de moments festifs d’après match : en partie haute, elles se prolongent par un large plateau qui s’ouvre sur une terrasse couverte. D’une superficie de 46 m2, cet espace extérieur semblant creusé dans l’épaisseur du volume est un extra : en effet, il ne figurait pas dans les données du concours.
Dans le couloir de distribution de l’étage, de grands vitrages toute hauteur laissent voir les activités sportives pratiquées sur le terrain en contrebas. Celles-ci sont également visibles en rez-de-chaussée, à travers les portes vitrées de la salle polyvalente. Éclairée par un grand bandeau en partie haute, la salle de sports principale (45 x 25 m) est structurée par six grandes poutres en treillis métalliques de couleur noire qui assurent les grandes portées libres nécessaires à la fonction. Le plafond réalisé en bac acier micro-perforé est lui aussi fondu dans le noir. Immaculées et provoquant un vif contraste, les parois verticales reçoivent un doublage acoustique assurant le confort sonore des lieux.
Si l’ossature de l’équipement, selon un système de murs porteurs en béton, relève d’un dispositif constructif classique, il n’en fut pas de même pour la réalisation des ferraillages et des coffrages. « Le chantier de gros œuvre a été réalisé par une petite entreprise locale et ce fut assez expérimental », raconte encore Christophe Gulizzi. En effet, les formes courbes ont nécessité la mise au point et la fabrication d’immenses moules en polystyrène, lesquels furent placés dans les banches. Ces éléments avaient été recouverts d’une fine couche de résine afin d’éviter que des bulles de plastique ne marquent le béton. Coulé en deux fois, le matériau brut est recouvert d’une peinture minérale de couleur blanche posée après ragréage.
Filtre musical
De son côté, la Maison des services publics se veut plus musicale avec ses façades faites de fins modules de béton rythmés verticalement. Cette nouvelle structure ayant pour objectif de faciliter les démarches des habitants regroupe pas moins de cinq services en une seule enveloppe. La nature des activités, portées vers l’assistance et l’accueil, dont un certain nombre d’enfants, nécessitait donc de protéger l’intimité des lieux. Le filtre de façade remplit cette fonction. Il protège également du rayonnement solaire sans nuire à la diffusion de la lumière. Celle-ci est d’autant plus abondante que les plateaux sont percés d’un patio central et que les parois nord-ouest sont entièrement vitrées vers de larges terrasses en R+1 et R+2 ainsi que sur un jardin en rez-de-chaussée dont bénéficient les enfants de la crèche. Le gabarit de la MSP s’intègre ainsi parfaitement avec les immeubles d’habitation voisins étagés en escalier. Toute hauteur sur une partie de la rue, le voile de façade se soulève avec douceur pour emmener les usagers jusqu’à l’entrée dans la maison protégée par un porte-à-faux qui entretient une continuité visuelle avec celui du gymnase. Cet écran protecteur qui singularise l’équipement est réalisé à partir d’éléments en béton préfabriqués dont le profil irrégulier présente cinq à six faces et décline cinq modèles. Ils sont fixés en deux points à une solide structure, également de béton, qui en reprend les charges.
Fluidités spatiales
À l’intérieur, les salles se succèdent de manière fluide grâce à une déambulation autour du patio. À l’étage 1, une surface d’exposition, qui n’était pas non plus demandée dans le programme, est offerte aux usagers. Accueillante, elle se déploie de part et d’autre d’une trémie et maintient un lien visuel vers l’accueil en rez-de-chaussée. Bordé de parois vitrées toute hauteur, ce plateau libre d’appropriation est structuré par d’épais portiques en béton peints en noir d’une grande expressivité plastique. Aux plafonds, des panneaux acoustiques aux formes courbes et de couleur blanche sont suspendus et apportent au lieu un côté ludique. Chacun arborant une forme qui sied à sa fonction, les deux équipements sont dotés des mêmes technologies de pointe en matière d’écologie : ils comportent par exemple des systèmes d’énergie renouvelable et une gestion de l’eau intelligente. Assurant le lien social ainsi qu’un repère structurant à l’échelle du quartier du Parc-aux-Lièvres, l’opération de gymnase et de Maison des services publics illustre on ne peut mieux la ligne de conduite à laquelle s’attache Christophe Gulizzi dans tous ses projets : « construire moins de signes et plus de sens ».
Localiser la réalisation
Reportage photos : © Stephen Dock, © Juan Jerez
Fiche technique
- Maître d’ouvrage : ville d’Évry-Courcouronnes
- Maître d’œuvre : Christophe Gulizzi architecte mandataire
- BET TCE : EPDC
- BET HQE® et thermique : IETI
- Entreprise gros œuvre : JP Gillard
- Surfaces : gymnase, 3 354 m2 SP ; MSP 1 940 m2 SP
- Coûts HT : gymnase, 5,88 M€ ; MSP, 6,285 M€
- Programme : gymnase (accueil, salles multisport, polyvalente, de danse, dojo) ; MSP (espaces accueil, agents, mairie annexe, maison de quartier, lieu d’accueil parents-enfants, multi-accueil 36 places, relais assistance maternelle).