Fabrication additive, impression 3D, ces terminologies sont de plus en plus associées au monde de la construction. Que recouvrent-elles ? Pour quels matériaux ? Et qu’apportent-elles réellement aux professionnels de l’acte de construire ?
« L’impression 3D a le pouvoir de révolutionner la façon dont nous fabriquons presque tout ».
C’est ainsi que Barack Obama envisageait la fabrication additive dès 2013. Car, si le principe de fabrication par dépôts de couches successives existe depuis trois décennies, le potentiel de cette technologie se révèle pleinement depuis ces dernières années seulement. L’industrie manufacturière mondiale s’y intéresse toujours davantage, pour des matériaux aussi divers que le plastique, les métaux, la céramique, les résines, les tissus…. et depuis quelques années le béton.
Liberté de création et impacts réduits
Les imprimantes 3D de béton sont désormais fonctionnelles et efficaces, même si les succès sont encore récents.
Les architectes se montrent particulièrement intéressés, car ils voient dans le procédé une possibilité de liberté architecturale et de «customisation» des ouvrages, la fabrication additive autorisant une grande liberté de formes. En outre, le process permet de limiter les quantités de béton utilisées, réduisant ainsi l’impact environnemental des ouvrages réalisés.
« L’intérêt véritable de l’impression 3D du béton, c’est la maquette numérique »,
s’enthousiasme Alain Guillen, directeur général d'XTreeE, start-up dédiée à la fabrication additive en béton, « car dès la conception, en travaillant sur le design de l’objet, nous pouvons utiliser la juste quantité de béton pour réaliser l’objet souhaité. Grâce aux applications développées dans nos logiciels de modélisation pour optimiser le design, les réservations et pour simuler l’impression des éléments en fonction de la forme du renfort intérieur, nous sommes capables de limiter l’usage de matière, tout en imprimant plus rapidement ».
Si l’économie de matériaux représente un atout dans un contexte environnemental toujours plus contraint, l’impression 3D du béton laisse aussi présager de gains de temps significatifs sur certains ouvrages (2 heures pour un mur de 6 m², soit près de trois fois moins qu’en traditionnel), tout en réduisant la pénibilité sur les chantiers. Toutefois, la technique reste aujourd’hui coûteuse, plus de 30 % par rapport à une maison traditionnelle par exemple, et en limite le développement rapide.
Des marchés de niche à une multiplication des projets
Si en France la technologie additive est encore lente à se développer, elle progresse toutefois rapidement, les projets quittant les seules applications de design et de mobilier pour aller vers des ouvrages complexes de bâtiments et d’infrastructures.
Les premières réalisations de maisons commencent en France et en Europe, la Chine a réalisé le pont en béton 3D le plus long du monde, et l’Arabie Saoudite prévoit d’imprimer, d’ici à 10 ans… un million et demi de maisons ! L’essor attendu est indéniable, mais comme l’anticipe Axel Théry, confondateur de Constructions-3D, « il faudra attendre dix ou quinze ans avant que la construction 3D devienne un standard… ».
Le marché se structure
En France, de nombreuses start-up développent le principe de la fabrication additive.
Aux côtés de XTreeE, Constructions-3D ou Soliquid, les majors du BTP, les cimentiers et les adjuvantiers s’intéressent aussi à l’impression 3D des matériaux. Bouygues Construction, à travers sa filiale Norpac, a démarré un partenariat avec l’école Centrale de Lille pour travailler à des applications possibles de ces technologies sur les chantiers. Plusieurs sociétés européennes, spécialistes du secteur de la construction, se sont associées pour créer une usine d’impression 3D pour les composants béton. Inaugurée en janvier 2019 à Eindhoven (Pays-Bas), ce site commercial et de production pour la construction 3D est le premier du genre. Un pont pour cycliste est déjà sorti du site, le prochain projet d’envergure étant la réalisation de 5 maisons à étages.
Le monde universitaire accompagne ces évolutions techniques : de nombreuses écoles et universités, partout en Europe, développent des projets de recherche et d’expérimentations. La dernière initiative est portée par l’Ecole Française du Béton, qui vient de lancer le projet « Béton3D écoles », un projet pédagogique déployés en deux temps : d’abord la fabrication d’une imprimante 3D béton grande taille et low cost, puis des réalisations concrètes avec l’imprimante mise au point. Ce projet concerne initialement plusieurs établissements de l’académie de Nantes, mais à vocation à se développer dans d’autres académies.
Quelques exemples de réalisations
Des totem pour un festival
Les étudiants de l'ETH Zurich ont conçu 9 colonnes en béton imprimé 3D de 2,7 m de haut, pour le festival de danse Origen de Riom (Suisse).
Le concept Yrys, vitrine technologique de la maison de demain
Inauguré en septembre 2018, le concept de maison individuelle YRYS réunit des innovations dans tous les domaines : architecture, confort, connectivité, smart énergie… Une vitrine technologique intégrant les solutions les plus innovantes pour le confort et le bien-être de ses occupants. Le constructeur a intégré, avec son partenaire cimentier, l’impression 3D en béton de certains éléments de structure de la maison : quatre poteaux extérieurs, exposés sur la façade sud de la maison, et un mur intérieur, apportant une esthétique particulière au salon.
Des maisons pour l’habitat social
En France, c’est à Nantes que Yhnova, la première maison imprimée 3D en béton a été réalisée. Portée par un bailleur social, la maison de 95 m², en forme de Y et aux murs arrondis, est née en quelques mois, réduisant considérablement les délais de construction. Elle est aujourd’hui habitée par une famille de 5 personnes.
A Reims, le bailleur social Plurial Novilia construit 5 maisons en béton 3D, mitoyennes et de plain-pied (projet Viliaprint). Les analyses scientifiques effectuées devront permettre au bailleur de faire passer rapidement l’impression 3D du stade expérimental actuel au stade pleinement opérationnel et reproductible.
Et en Amérique Latine, une communauté de 400 personnes défavorisées devrait être logée dans des maisons construites avec des imprimantes 3D en moins de 24 heures, l’un des porteurs du projet ayant déjà réalisé une maison test de 55 m² au Texas, pour un coût d’environ 3 500 €.
Des récifs artificiels en bétons imprimés 3D
XtreeE a collaboré avec Seaboost, filiale du groupe français Egis spécialisée dans l’ingénierie écologique, pour la réalisation d'un projet de récif artificiel en béton imprimé en 3D qui a été immergé dans le Parc National des Calanques (France), dans le but de restaurer un habitat écologique perdu.
Le pont 3D le plus long du monde
C’est dans un quartier industriel de Shangai que les piétons peuvent désormais utiliser un pont en béton imprimé 3D. Sa particularité : il est aujourd’hui le plus long du monde réalisé dans cette technologie. D’une longueur de 26,3 mètres et d’une largeur de 3,6 mètres, la passerelle est composée de blocs accolés, qui intègrent des capteurs pour collecter des informations sur les déplacements, dans la perspective d’améliorer la mobilité urbaine et les conceptions futures.
Renseignements pris, aujourd’hui l’impression 3D en béton ne peut être utilisée que pour des ouvrages non structurels ; il n'y a pour l'instant pas de règles de dimensionnement des bétons imprimés en 3D, et donc pas de formation sur le sujet. Nous ne pouvons que vous suggérer de prendre contact avec une des start-up concernée, comme Xtreee https://xtreee.com/ ou autres, qui doivent suivre l'évolution de la réglementation sur le sujet avec intérêt. Bien à vous, L'Equipe Infociments