Combinant confort d’usage et qualité architecturale, la résidence Clément Marot est une pièce maîtresse du nouvel écoquartier Monconseil.
À l’image de nombreuses périphéries françaises, la frange nord de Tours constituait jusqu’à peu un territoire mal défini, occupé par des développements pavillonnaires et des zones d’activités. Le réchauffement climatique et la récente prise de conscience environnementale semblent avoir mis un terme à ce type d’urbanisation marquée par l’étalement urbain au profit d’une ville plus dense, fondée sur la mixité des populations et des fonctions, la réduction des déplacements et la préservation du cadre de vie.
Programmé en 2006 sur d’anciennes friches agricoles, l’écoquartier Monconseil répond à ce changement de paradigme en rééquilibrant l’agglomération tourangelle grâce à la création d’une nouvelle centralité desservie par la récente voie de tramway reliant le centre-ville. Fondé sur la construction de près de 1 200 logements, ce projet ambitieux s’appuie sur la réalisation d’un « cœur marchand » constitué de commerces et de services de proximité, l’aménagement de nouveaux espaces publics et l’implantation de PME-PMI.
Un ensemble conçu en fonction du territoire
Élaboré par le cabinet d’architectes urbanistes Eva Samuel et associés, le nouveau quartier est structuré par deux axes orthogonaux. D’une part, la rue Daniel Meyer le long de laquelle de développe un linéaire d’immeubles de trois à six étages, équipés de vitrines commerciales en rez-de-chaussée. D’autre part, une coulée verte reliant le parcours du tramway, lui aussi support à l’implantation de constructions denses. En périphérie, des gabarits plus modestes assurent la transition avec le tissu de maisons individuelles qui borde l’opération.
Récemment livrée par Nathalie Régnier-Kagan, la résidence Clément Marot marque l’intersection des deux axes de composition. L’épannelage de cette pièce maîtresse du nouveau quartier se partage en trois entités : un plot R+6 constituant un signal urbain, une barre à R+3 accompagnant la déclivité des gabarits vers le sud et un square planté qui prolonge les espaces publics adjacents.
Les volumes bâtis sont reliés entre eux par un bâtiment intermédiaire à R+2 qui aménage des percées vers l’intérieur de la parcelle sous forme de liaisons douces. Les niveaux supérieurs sont desservis par de longues coursives équipées d’escaliers à chacune de leurs extrémités : d’une part au cœur de l’immeuble-plot, en lien avec l’ascenseur, et d’autre part, sur le pignon de la barre. La résidence est ainsi dotée de deux entrées : une depuis le hall, l’autre directement depuis la rue.
La distribution du programme
Le programme regroupe 37 logements au-dessus d’un socle de commerces et de locaux d’activités construits sur un sous-sol abritant les parkings et les caves.
Au rez-de-chaussée, le hall traversant, contrôlé par la loge du gardien, distribue les étages et le local vélos/poussettes. Il jouxte une surface d’activités implantée à l’angle de l’immeuble-plot. D’autres services et activités occupent le rez-de-chaussée de l’immeuble bas.
Les appartements sont organisés dans les étages en fonction des vues, des expositions et de l’animation des façades. Ainsi, les niveaux supérieurs sont-ils travaillés deux par deux pour donner une dimension plus importante aux percements et exprimer une certaine présence sur le parc malgré les réductions d’ouvertures imposées par la RT 2012.
Des logements traversants pensés en termes d’usage
La double ou triple orientation des logements participe du confort d’usage en multipliant les vues et les possibilités de ventilation et d’éclairement naturel. Dans la barre, des T2 et des T3 disposés en simplex sont dotés de cuisines ouvertes qui peuvent être closes en fonction des besoins des occupants. En R+1, une terrasse filante met les espaces de vie à distance des nuisances de la rue. De l’autre côté, sur le square, les chambres sont détachées des coursives par un vide. Dans l’immeuble-plot, le dessin des appartements ménage une relation diagonale entre le salon et la salle à manger en laissant percevoir l’espace dans sa plus grande dimension. Le sentiment de confort est ainsi maximalisé et plus encore dans les duplex qui occupent les étages supérieurs grâce aux vides sur séjours et à la superposition des espaces extérieurs. Ici, comme dans l’ensemble de l’opération, l’épaisseur des façades permet de régler les questions d’usage notamment par des prolongements composés de grandes terrasses ou de loggias.
Le caractère des logements tient aussi à la qualité des matériaux employés, tant pour les façades que pour les intérieurs comme en témoignent les menuiseries en aluminium ou encore les escaliers métalliques hélicoïdaux dotés de marches en bois qui équipent les duplex.
Le parti constructif est dicté par une volonté d’économie et d’efficacité de mise en œuvre. Ainsi, la trame structurelle est composée de refends porteurs en béton armé contre lesquels sont adossées les gaines verticales.
En libérant de vastes plateaux de 7,40 m de large, cette disposition permet l’éventuelle réversibilité du bâtiment tandis qu’en rez-de-chaussée, des jours ménagés au sein des voiles porteurs autorisent aisément l’association de plusieurs trames. Les planchers du rez-de-chaussée sont réalisés en prédalles, ceux des autres étages en poutrelles/hourdis. Mais, ce sont des façades en béton lasuré qui retiennent principalement l’attention. Leur mise en œuvre s’est effectuée grâce à des murs à coffrage intégré (MCI) de qualité architectonique combinés avec des éléments d’angle et des potelets en béton préfabriqués. Frédéric Ribeiro, de l’entreprise Ribeiro Construction, se satisfait de cette solution : « devant les hauteurs de modules de façade (3 ou 6 m), les jeux de décalage et la présence de poteaux d’angle, l’option coulée en place présentait des risques importants, tandis que le recours à des préfabriqués lourds apparaissait trop onéreux au regard de l’enveloppe financière. C’est pourquoi nous avons proposé ce procédé lors de la mise au point des marchés. »
De fait, la mise en œuvre des façades a fait l’objet d’une attention particulière à l’instar des assemblages entre les éléments préfabriqués et les MCI, permettant de traiter les tranches des MCI. Des points spécifiques tels que les poutres filantes en façade du rez-de-chaussée de la barre ont été traités par des prémurs de 30 cm d’épaisseur afin de loger l’important ferraillage imposé par leur configuration en porte-à-faux.
Il faut aussi citer la réalisation des panneaux de façade de 6 m de haut dont le clavetage au niveau des planchers intermédiaires s’est opéré par des réservations horizontales sur la quasi-totalité de la largeur des MCI afin d’obtenir un effet de peau continue.
Béton brut et performance thermiques
Le bâtiment est isolé par l’intérieur et des rupteurs de ponts thermiques ont été généralisés sur tous les linéaires de plancher. L’opération est conforme à la RT 2012 et à la certification Qualitel Habitat & Environnement.
Le respect des impératifs thermiques est donc passé par une logique architecturale, constructive et économique mettant le béton en avant, dont Nathalie Régnier-Kagan se déclare particulièrement fière : « l’agence a toujours défendu le béton en façade. C’est un matériau qui se suffit à lui-même. Il se peint, se lasure, se relasure et, finalement, s’avère véritablement pérenne et plus économique que des vêtures ou des bardages souvent onéreux et peu durables. »
Reportage photos : Hervé Abbadie
Maître d’ouvrage : Tours Habitat – Maître d’œuvre : N. Régnier-Kagan, architecte ; J.Zaffaroni, assistant – BET structure : Ecodiag, groupe Nox – Entreprise gros œuvre : Ribeiro Construction – Préfabricant : ABP (Vienne) – Murs à coffrage intégré : Spurgin Léonard – Surface : 3 289 m2 SHON – Coût : 4,59 M€ HT – Programme : 37 logements collectifs et des locaux d’activités.