Construit au début des années 1970, le quartier Maison Rouge à Louviers avait bien vieilli et supportait de moins en moins sa configuration en cul-de-sac. Rénover, réunir et rendre plus circulants les deux parcs de logements sociaux, tel était le souhait de la municipalité. Débuté en 2011, le chantier de rénovation est quasiment terminé. Les quelque 1 700 habitants du quartier, soit près de 10 % des Lovériens, peuvent profiter d’un environnement désormais ouvert sur la ville et de nombreux espaces favorisant les échanges.
Des arbres sagement alignés et des plantations bien encadrées, mais aussi des herbes folles entre des rochers, sans oublier des légumes que l’on voit poindre dans les potagers : vous êtes dans le quartier Maison Rouge à Louviers. Sur le trottoir, un élégant totem blanc ceint d’un liseré rouge indique le numéro de l’immeuble auquel il fait face. Plus loin, une fontaine coule sans précipitation tandis que des jeunes jouent au basket sur le citystade. Né en 1971 dans la périphérie ouest de la ville, ce quartier a grandi au diapason du développement économique de cette dernière avant de se dégrader au fil des ans et des vagues successives de locataires. Souhaitée dès le début des années 2000, la rénovation n’a débuté qu’en 2011. D’ores et déjà à 90 % réalisée, elle devrait se terminer en fin d’année.
Si le projet Maison Rouge est né de la stratégie urbaine générale d’une municipalité attentive au quotidien de ses administrés, il répond néanmoins à des préoccupations plus précises : l’intégration du quartier au reste de la ville, la mise en place d’une meilleure circulation, la lisibilité et la qualité de ses espaces publics, l’amélioration de son image et de son attractivité. « Des enjeux qui ont guidé la définition de l’intervention globale, articulant de manière cohérente des objectifs à la fois urbains, sociaux et humains », explique Solange Oostenbroek, chef de projet Anru (Agence nationale pour la rénovation urbaine) Maison Rouge. Autant de souhaits clairement exprimés dans le cahier des charges. « L’objectif était de donner une unité à l’ensemble de 13 hectares. Il fallait répartir le foncier, repenser tous les espaces extérieurs, rassembler les deux grands ensembles du quartier et reconnecter l’ensemble au reste de la ville », explique le paysagiste urbaniste Stéphane Mercier, du cabinet Les Rondeaux-Atelier Michèle Elsaïr.
Une grande diversité de matériaux
Certains immeubles furent voués à la destruction (deux doivent encore l’être) et tout fut redessiné à partir de ceux demeurés en place. Il a fallu créer des cheminements, réaliser des trottoirs, délimiter des espaces verts, aménager des aires de jeux, installer des totems, des murets, du mobilier urbain… Peu de chantiers sont aussi diversifiés que celui-là et utilisent autant de matériaux. « Béton de sol en plusieurs tons de chocolat avec différents états de finition – brossé, squamé, poncé, lissé avec inclusion de bande en béton blanc dans les sols –, sable stabilisé blanc cassé renforcé au ciment, béton drainant teinté et poncé pour le citystade, enrochement en pierre naturelle, béton teinté noir pour la fontaine… », énumère Samuel Béard, chef de l’agence Haute-Normandie de Minéral Service.
En effet, l’esprit créatif des Rondeaux a su offrir au quartier des aménagements singuliers, sources d’animation et de lien. Là, où n’existait qu’un passage ordinaire entre deux immeubles, coule désormais une fontaine en forme de ruisseau qui, la nuit tombée, se voit accompagnée par des dessins d’oiseaux projetés sur les murs. Ici, où il n’existait qu’une prairie d’herbes folles, a été organisée une aire de jeux avec table de ping-pong, One Wall (mur servant à une sorte de pelote basque qui se joue à la main), buts de foot et banquettes pour discuter. « Nous avons utilisé les deux clairières du quartier pour ajouter du mobilier et aussi des équipements sportifs. Nous avons voulu que les différents espaces s’imbriquent entre eux pour que la mixité des usages entraîne aussi celle de la fréquentation », précise Stéphane Mercier.
De l’art de la coordination
Cependant, un tel chantier n’est pas sans difficulté. « La principale fut de “traduire dans le dur” l’approche du cabinet Les Rondeaux-Atelier Michèle Elsaïr et de répondre à l’exigence technique qu’elle imposait. Il a fallu ajuster en permanence notre projet. Un travail d’orfèvre qui se joue au quotidien entre notre maîtrise d’œuvre et Minéral Service, dont les équipes ont su s’adapter avec implication », explique Solange Oostenbroek. De son côté, Minéral Service évoque un chantier à réaliser alors même que les habitants ont besoin d’y circuler, d’y stationner leur véhicule, d’y vivre normalement tout simplement. « Travailler autour d’immeubles habités est toujours une contrainte. Nous avons beaucoup discuté avec les riverains, leur avons expliqué ce que nous faisions et comment les travaux allaient se dérouler. Aujourd’hui, nous pouvons dire qu’il s’est plutôt très bien passé. Evidemment, un tel chantier demande une véritable organisation. Pas question d’entamer des réalisations dans plusieurs endroits en même temps. Il faut pouvoir commencer et terminer une partie avant d’en entamer une autre.
Une coordination est donc nécessaire entre les différents corps de métier. Ce qui n’est pas toujours évident », souligne Frédéric Delaunay, conducteur de travaux rattaché à l’agence de Rouen de Minéral Service.
« Il est difficile de contenter tout le monde. Il y a toujours ceux qui auraient voulu conserver leur parking au plus près de leur porte et ceux qui préfèrent un jardin aux places de stationnement ! Disons que des changements aussi importants bouleversent les habitudes. C’est normal qu’il y ait un temps d’adaptation à toutes ces transformations. Notre objectif était de redonner de la qualité urbaine et de forger une identité à ce quartier. Nous espérons avoir réussi », souligne Stéphane Mercier. Désormais, Maison Rouge peut être traversé de part en part ; à la sortie des écoles, parents et enfants empruntent les trottoirs ; le soir de la Fête de la musique, le kiosque résonne et, le week-end, les jardins familiaux s’animent. Un quartier plus tout à fait comme un autre.
Principaux intervenants
Maîtrise d’ouvrage : Communauté d’agglomération Seine-Eure, Ville de Louviers, Secomile et SEM EAD (Eure Aménagement Développement). - Maîtrise d’œuvre : Cabinet Les Rondeaux-Atelier Michèle Elsaïr, Servicad, Cabinet Ulysses. - Entreprise mandataire: Minéral Service (cotraitant Via France) - Réalisation des bétons décoratifs : Minéral Service - Fournisseur des granulats: CRH (ex-Holcim Granulats France) - Fournisseurs du béton : Béton chocolat : CRH (ex-Holcim Béton France), Béton drainant : Lafarge France - Fournisseur du sable stabilisé : Cemex