À vingt kilomètres au sud de Paris, la ZAC du quartier de Moulon (Essonne) – partie du vaste projet Paris-Saclay, la « Silicon Valley » française – va accueillir l’École normale supérieure (ENS-ex-Cachan), CentraleSupélec, des résidences universitaires, des logements et des commerces… Un projet ambitieux qui intègre à son esthétique et à sa modernité des revêtements en béton : plus de 10 000 m² y seront mis en œuvre d’ici à 2020.
Avec plus de deux millions de mètres carrés concernés, le projet Paris-Saclay constitue le plus vaste projet urbain européen actuellement en construction. Créé sur le plateau de Saclay, au sud de l’Île-de-France, ce pôle scientifique et technologique (cluster) concentrera à terme entre 20 et 25 % de la recherche scientifique française. Il se compose de plusieurs zones d’aménagement concerté (ZAC) dans les Yvelines et en Essonne, placées sous la maîtrise d’ouvrage de l’Établissement public d’aménagement Paris-Saclay et destinées à permettre l’éclosion des futurs quartiers de cette « Silicon Valley » française.
La ZAC de Moulon, quartier du cluster Paris-Saclay
À cheval sur trois communes (Orsay, Gif-sur-Yvette et Saint-Aubin), la ZAC du quartier de Moulon (Essonne) s’étend sur 337 ha. Elle se situe dans la partie sud du cluster Paris-Saclay. L’urbanisation du quartier est prévue jusqu’à fin 2028, mais des résidents s’installent déjà. En plus de services, de commerces et d’espaces verts (le parc de Moulon, le Jardin argenté), le nouveau quartier qui sort de terre est le lieu d’implantation de l’École normale supérieure (ENS) Paris-Saclay (ex-Cachan) et de l’école d’ingénieurs CentraleSupélec. Il accueille l’accélérateur de particules (synchrotron) Soleil, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ainsi que l’université Paris-Sud. Le quartier de Moulon englobe également trois parcs d’activités dédiés aux entreprises.
Architecture contemporaine et paysage
Plusieurs grands noms de l’architecture contemporaine et du paysage – Michel Desvigne, Renzo Piano, OMA, Jean-Michel Wilmotte, Studio Muoto – signent les multiples bâtiments ou aménagements en cours d’achèvement.
Les travaux d’aménagement des voiries et des espaces publics avancent également à grands pas. On y note la présence très esthétique de bétons décoratifs pour le revêtement des trottoirs et de certaines voiries, une volonté de l’Atelier de paysages parisien Bruel-Delmar, qui a repris la maîtrise d’œuvre du projet en 2017.
Le choix du béton
« Au préalable, il faut rappeler que le béton a été retenu pour affirmer les orientations urbaines du quartier », souligne-t-on à l’Atelier de paysages Bruel-Delmar, mandataire du groupement en charge de la maîtrise d’œuvre.
Pour les architectes, l’intention était double : « À la fois, marquer les centralités de quartier et affirmer la prédominance de la place donnée aux piétons, précisément sur le territoire de Gif-sur-Yvette. Et, parallèlement, à l'échelle de Moulon et du plateau de Saclay, souligner la grande armature nord-sud des espaces publics qui relie le plateau et la vallée de l’Yvette aux grands systèmes de parcs paysagers. Ces grandes continuités “piétons et cycles” mettent en relation les grandes centralités de quartier avec les systèmes de parcs. Le béton permet d'affirmer cette armature piétonne et de promenade. »
Un marché à bons de commande
Il s’agit d’un marché à bons de commande, conclu en 2018 pour quatre ans et renouvelable en 2022. Il est réalisé par trois sociétés : la Société francilienne de routes et d’équipements (SFRE) est chargée des terrassements, tandis que la mise en œuvre des revêtements en béton a été confiée à deux spécialistes, la société essonnienne PDF TP, basée à Morangis, en association avec Sols Confluence, l’agence lyonnaise du groupe Sols. PDF TP a été l’une des toutes premières sociétés franciliennes choisie comme « applicateur » par Lafarge pour ses bétons décoratifs. Depuis deux ans, seule l’entreprise essonnienne est intervenue sur le chantier. Sols Confluence devrait le faire à l’avenir.
Une finition bouchardée
Tous les revêtements en béton sont bouchardés. Ils sont réalisés à base de ciment Lafarge dans la centrale BPE de Wissous. Dotée d’une importante capacité de production, elle est la seule habilitée à approvisionner le chantier de la ZAC de Moulon. « Les formules sont spécifiques, précise Sébastien Vermeil, le dirigeant de PDF TP. Elles ont été mises au point après plusieurs planches d’essais, en liaison étroite avec le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre, pour une durée de vie estimée à trente ans. »
Les structures retenues
En fonction des types de circulations, les structures retenues sont :
Sous-couches
- de la GNT (sur 10, 20 ou 25 cm pour les cheminements piétons) ;
- de la grave-ciment (sur 35 cm pour les voies « pompiers », les stationnements et la voirie).
Revêtement des trottoirs (cheminements piétons)
Au total, PDF TP et Sols Confluence couleront 10 500 m² de béton pour la réalisation des trottoirs, à raison d’environ 50 m³ par semaine.
Zone ENS : 3 500 m².
Zone O’Rizon : 7 000 m².
Le béton BC 5 (Artevia® Roche de Lafarge) est mis en œuvre sur une épaisseur de 12 cm. Il intègre un granulat Dmax 8. Son aspect de surface est agréable et il offre un excellent confort d’utilisation. La couleur, un crème légèrement ocré, a été choisie pour être en harmonie avec les tonalités des aménagements urbains de la ville voisine de Gif-sur-Yvette.
Particularité : les trottoirs de la ZAC de Moulon sont divisés en quatre zones. Après la bordure noire située le long de la voirie (largeur de 25 cm), une première zone large de 35 cm est réalisée en béton crème-ocre. « Elle permet aux automobilistes d’ouvrir leurs portières côté trottoir, sans gêner la circulation des deux-roues », explique Grégory Aissa, le conducteur de travaux de PDF TP. Puis, après une bordurette (10 cm), vient la piste cyclable, large de 1,50 m, réalisée en enrobé de couleur ocre orangé. Une troisième zone de 2 m de large, en revêtement de béton crème-ocre, permet la circulation des piétons. Enfin, au droit des immeubles, une double rangée de bordures de couleur noire (type Volvic : cailloux noirs, sable noir) permet de dissimuler les réseaux et d’en faciliter l’accès en cas de travaux.
Finition du béton : bouchardage.
Revêtement des voies « pompiers », des voies d’accès aux parkings souterrains et des places de stationnement
Il a été prévu que PDF TP et Sols Confluence en couleront au total 7 300 m².
Zone ENS : 2 900 m².
Zone O’Rizon : 4 400 m².
La largeur de ces voies varie de 5 à 8 m, selon la configuration des lieux. Le béton BC5 (Artevia® Roche de Lafarge), de couleur crème-ocre, avec un granulat Dmax 20, est mis en œuvre sur une épaisseur variable : 15 cm pour les voies « pompiers » et les places de stationnement (éventuellement 18 cm pour un trafic T5 [3 à 25 PL/j] et 21 cm pour un trafic T4 [26 à 50 PL/j]).
Finition du béton : bouchardage.
Structure de voiries
La superficie à réaliser par PDF TP et Sols Confluence est de 4 700 m2.
Zone ENS : 1 200 m².
Zone O’Rizon : 3 500 m².
La couche de fondation est constituée de 15 cm de béton BC3 fibré et surmontée d’une couche de surface de 19 cm en béton BC5 (Artevia® Roche de Lafarge), crème-ocre, avec un granulat Dmax 20.
Finition du béton : bouchardage.
Mise en œuvre
Avant la mise en œuvre du béton de revêtement, PDF TP a posé 15 km de bordures de trottoirs en béton, préfabriquées par Sitinao (Bonna Sabla), de type Volvic, de couleur noire (cailloux noirs, sable noir), ainsi que des éléments préfabriqués pour l’assainissement (têtes d’aqueduc et batardeaux).
« Nous n’intervenons que pour le coulage de la couche de surface et de la couche de base, précise encore Grégory Aissa. La couche de forme est préparée par SFRE. »
Au sein de la ZAC de Moulon, PDF TP opérait, cet automne 2019, sur une zone correspondant à un quadrilatère de 500 m sur 400 m. « Pour des motifs pratiques, nous avons divisé cet ensemble en deux, en distinguant les travaux effectués autour de l’École normale supérieure (ENS), située au nord-est, et ceux réalisés dans le secteur que nous avons baptisé O’Rizon », indique le conducteur de travaux.
Pour des raisons d’accessibilité mais également « par préférence », PDF TP met en œuvre le béton à la pompe. « Dès l’origine, la formule retenue pour le béton était un béton pompable, très plastique, de classe S3, avec entre 100 et 150 mm d’affaissement au cône d’Abrams, indique Grégory Aissa. Compte tenu de la présence des bordures, il y a peu ou pas de coffrage, ce qui facilite la réalisation. Nous sommes rodés à ce type de mise en œuvre qui nous permet de couler sur de grandes superficies, après une préparation minutieuse, à raison de 5 à 8 toupies par jour, soit 50 à 60 m³, jamais en dessous de 200 m² (et jusqu’à 400 ou 500 m²) en une seule intervention. » Préalable indispensable : l’utilisation de produits spécifiques (du type Protector de Grace-Pieri) pour éliminer les éclaboussures.
Une fois pompé, le béton est réglé de préférence au rouleau striker, « ce qui permet un gain de temps appréciable » et, à défaut, manuellement, à la règle. Et cela sans vibration pour éviter la ségrégation des granulats.
Cure
« Un produit de cure du type Easy Cure de chez Grace est pulvérisé environ une ou deux heures après le réglage, indique Grégory Aissa. Nous n’utilisons pas de film en polyane pour recouvrir le béton frais. »
Joints
Joints de retrait
Les joints de retrait (largeur de 3 ou 4 mm) sont réalisés entre « J + 1 et J + 3 » en fonction des conditions météorologiques et du calepinage de l’architecte, selon les indications fournies par CIMbéton, à raison d’un trait de scie au minimum par 20 à 25 m² (compte tenu de l’épaisseur). Ces traits de scie sont comblés de Weber Joint Large en prévision du bouchardage et pour ne pas endommager les arêtes des sillons ainsi réalisés.
Joints de dilatation
« Pour les trottoirs et pour les voies “pompiers”, nous utilisons des joints de dilatation classiques en aluminium. Nous les avons choisis de type Essoflor MM Alu pour les trottoirs et de type Terrajoint de chez Peikko pour la voirie. Ils sont espacés tous les 20 à 30 m, en concertation avec le cabinet Bruel-Delmar et PDF TP », détaille Grégory Aissa.
Bouchardage
Après test au scléromètre pour vérifier la résistance du béton, qui doit être comprise entre 12 et 15 MPa, le bouchardage peut être réalisé. Il s’effectue sur une épaisseur de 3 ou 4 mm. « Dans la mesure du possible, détaille le conducteur de travaux de PDF TP, nous utilisons des bouchardeuses télécommandées et autopropulsées, car ces machines sont lourdes et difficiles à manier. » Une fois le bouchardage effectué et après nettoyage à haute pression (qui permet également de se débarrasser des éclaboussures traitées au produit de protection), PDF TP applique un apprêt « bouche-pores » Protect Emulsion de chez Grace afin de colmater les microaspérités du béton et de le rendre moins vulnérable aux tâches. Le travail est achevé.
Contraintes du chantier
« Nous avons commencé à mettre en œuvre les différents types de bétons quasi simultanément en septembre 2018, en fonction de l’avancée des travaux, explique Grégory Aissa. La cadence est d’environ un coulage par semaine, compte tenu notamment de la météo. L’importance du chantier rend le phasage complexe. À peine achevés, certains immeubles sont déjà habités. Nous devons donc rendre les abords circulables le plus rapidement possible. Étant donné le nombre d’intervenants, la coordination est forcément délicate et il n’est pas rare que nos réalisations aient à en souffrir, notamment à cause de la circulation prématurée d’engins lourds. C’est une contrainte à laquelle nous avons dû nous adapter et qu’il a fallu surmonter. »
« Le chantier de la décennie »
« Pour une entreprise comme PDF TP, le chantier de la ZAC de Moulon, c’est le chantier de la décennie, pour ne pas dire du siècle ! concluent ensemble Sébastien Vermeil, le dirigeant, et Grégory Aissa, le conducteur de travaux. Cette superbe opération nous offre la possibilité de mettre en œuvre notre savoir-faire béton de façon exceptionnelle, sur une longue durée. Du point de vue technique, participer à la création de la future “Silicon Valley” française, c’est extrêmement valorisant et enrichissant. Et esthétiquement, le résultat est très réussi ! »
Principaux intervenants
Maîtrise d’ouvrage : EPA Paris-Saclay - Maîtrise d’œuvre : Groupement Atelier de paysages Bruel-Delmar (mandataire) - Germe & JAM urbanistes-Artelia BET VRD-Scène publique éclairagiste Entreprises : Groupement TERE-Colas (réseaux)- SFRE (mandataire) Mise en œuvre du béton décoratif : PDF Travaux publics et Sols Confluence Fournisseur du béton : Lafarge (centrale BPE de Wissous) Fournisseur du ciment : Lafarge