Le bâtiment central composé de 3 strates horizontales marquées par un changement de rythme des ouvertures et un matériau différent correspondant à la répartition du programme par niveaux.

En fonctionnement depuis quelques mois, le nouveau campus d’EDF vient compléter un centre de recherches et développement, déjà présent à Saclay, pour former le Lab d’EDF. Implanté dans ce cluster dédié à la recherche industrielle dans les hautes technologies, le bâtiment se devait de répondre aux ambitions du leader mondial de la production d’électricité et proposer une image forte, innovante, dans la lignée et la tradition d’avant-garde d’EDF, lequel a très souvent incité les maîtres d’œuvre à l’audace, tant architecturale que technique. Ainsi, malgré l’ampleur du territoire disponible, le maître d’ouvrage souhaitait un bâtiment unitaire, compact, à l’inverse des campus « à l’américaine » composés de pavillons disséminés.

Premier challenge pour les architectes, compte tenu de la diversité du programme intégrant des fonctions très diverses… espaces de formation, restauration, hôtellerie, exposition, réception, détente, etc. Pour résoudre cette question et concevoir un bâtiment singulier, l’agence ECDM pousse le principe de compacité à son paroxysme en proposant un ensemble de trois parallélépipèdes, dont le plus important fait fonction de corps central. S’en détachent, sur la face avant, l’espace d’exposition et, à l’arrière, une halle technique de formation. L’emprise réduite du bâtiment offrait la possibilité de créer, sur l’ensemble de la parcelle du Lab d’EDF, un grand jardin conçu par le paysagiste Pascal Cribier.  

Une architecture vibratoire

Bien plus que la compacité, c’est le principe de répartition du programme qui caractérise fortement le bâtiment. À chaque fonction son (ses) étage(s). Ainsi, pour obtenir un campus vertical, les architectes ont choisi de superposer des strates horizontales, ordonnées du public vers l’intime – strates qui se lisent parfaitement en façade par un principe d’écriture fondé sur un travail rigoureux de la trame et par le choix de matériaux à fort caractère et contrastés – 4 frises différenciées par un rythme et un motif singuliers, ainsi qu’une matérialité différente. 


La première strate, le rez-de-chaussée, niveau de l’accueil, de la salle d’exposition, de la halle technique, des pièces de réception, etc., fait office de piètement, parée d’inox et de verre. La deuxième, composée des deux étages suivants, les R+1 et R+2, est occupée par les salles de formation, reconnaissable en façade par des fenêtres très allongées et une peau de béton marron. La dernière strate comprend également deux niveaux, les R+4 et R+5, réservés à l’hôtellerie et destinés à accueillir le personnel en formation. Elle est caractérisée par un tout autre rythme de percement et une peau de béton gris clair. Ces deux couches de béton enserrent la troisième strate dédiée aux espaces collectifs privés (restauration, bibliothèque, lieux de détente, salle de sport, etc.). Entièrement vitrée, elle permet aux occupants de se projeter dans le paysage alentour et de profiter de très belles perspectives sur le jardin et, au loin, sur le cluster en pleine évolution.  

Un lieu de vie H24

Le campus est amené à accueillir 160 000 employés en formation chaque année, exerçant des métiers très différents correspondant aux activités diversifiées du groupe EDF. Le lieu se devait de leur offrir des locaux efficaces, agréables, où ils puissent à la fois se concentrer lors des moments de formation, mais aussi se rencontrer, se détendre, etc. Les espaces proposés sont modulables et lumineux, l’organisation générale transparente au sens propre comme au sens figuré. Chaque nouvel arrivant peut s’y repérer facilement et surtout ne pas avoir la sensation de pénétrer dans un centre classique de formation mais un lieu de vie – impression donnée dès le hall, plus que généreux et ouvert sur le patio, l’un des points forts du projet. Végétalisé par Pascal Cribier, il est multifonction… Évidemment générateur d’une très belle quantité de lumière naturelle au cœur du bâtiment, il y introduit un poumon vert en écho au jardin extérieur. Lieu de détente, il fait également fonction de point de repère visuel.  

Le BFUP comme un gant

Même si l’inox et le verre sont assez présents visuellement, c’est bien le béton qui marque le plus l’enveloppe du bâtiment, notamment par le caractère innovant des éléments de BFUP qui y sont mis en œuvre. Pour Dominique Marrec, amoureuse inconditionnelle de la matière, et notamment du béton, passionnée par la matérialité, il s’agit de l’aboutissement de 15 ans de recherche sur ce matériau. Pour la première fois, les éléments de façade préfabriqués sont constitués de BFUP projeté dans une série de moules en bois, parfois de très grandes dimensions, de façon à obtenir des « pièces » qui puissent épouser au millimètre la modénature de la façade et masquer ce qui doit l’être pour n’afficher en façade que la rencontre du béton et du verre – un procédé offrant la possibilité de créer une architecture du sur-mesure. Ce procédé augmente le caractère ductile du béton, lequel devient plus qu’un revêtement mais une peau préfabriquée et sophistiquée, pouvant épouser les reliefs les plus subtils. Les panneaux mis en œuvre peuvent atteindre 7 m de hauteur, pour 2,70 de largeur et 60 cm de profondeur, avec une épaisseur de matière réduite à 
15 mm en partie courante. 


« La possibilité de projeter le BFUP modifie la façon de concevoir un élément préfabriqué en rendant obsolète le procédé moule contre moule au profit du principe de la coque qui ouvre presque à l’infini le champ des possibles », commente Dominique Marrec.

Variations sur le béton

Rythme, séquence, composition caractérisent les réalisations de l’agence ecdm qui se plaît à exploiter toutes les facettes du béton pour servir ses projets. Le campus EDF en est un très bel exemple. Et effet, il apparaît ici « sous toutes ses coutures ». Sous forme de béton matelassé, clin d’œil au « matelassé Chanel », un béton matricé créé par l’agence en 2008, il imprime les cages d’escalier. Plus classique, le béton assure la structure du bâtiment coulée en place dont la typologie s’adapte également à la diversité du programme. De type poteaux/dalles pleines coulées en place pour éviter les poutres de rive dans les étages inférieurs, elle est de type voiles intérieurs porteurs pour les niveaux dédiés à l’hôtellerie. Certains éléments ont été laissés bruts, notamment au niveau du rez-de-chaussée, pour répondre de façon décalée au sol couvert de marbre. Autre registre dans la halle technique. Ici, une passerelle, coulée en place et délimitée par une série d’arcs, slalome entre les salles de formation délimitées par une série de voiles intérieurs en parpaings laissés apparents avec joints tirés au fer.

Prise en compte environnementale

Loin de n’être que le résultat d’un jeu esthétique et/ou rythmique, les façades du nouveau campus d’EDF, très performantes en termes d’isolation thermique, ont participé pleinement à l’obtention des certifications HQE® et BREEAM, niveau excellent. En effet, la création d’éléments de béton très fins épousant parfaitement les reliefs facilite l’intégration d’un isolant et évite les ponts thermiques. Cette maîtrise de la consommation énergétique est renforcée par le développement des énergies renouvelables, géothermie sèche, panneaux solaires photovoltaïques et thermiques installés en toiture. La très bonne gestion des autres volets techniques du projet explique son niveau d’excellence. Ainsi, le choix de matériaux de classe A+, présentant un niveau très faible d’émissions de COV (composés organiques volatils), participe à la qualité de l’air intérieur. 
Les eaux pluviales sont recueillies dans de longues noues intégrées au dessin du jardin 
qui sert d’écrin à cette nouvelle pièce architecturale empreinte d’urbanité dont le rythme vibratoire entre en résonance avec le paysage alentour. 

Reportage photos : Jérémy BERNIER ; Schnepp RENOU ; Benoît FOUGEIROL

Maître d’ouvrage délégué : Sofilo – Assistant maître d’ouvrage conception : Orénoque – Assistant maître d’ouvrage travaux : AIA – Maître d’œuvre : ecdm – BET structure : Jean-Pierre Miécaze – BET façade : VP&GREEN – Entreprise gros œuvre : Bouygues – Réalisation des éléments BFUP de façade : Betsinor, C&E ingénierie – Surface : 26 000 m2 SDP – 
Coût : 70 M€ HT – Programme : un centre de formation et un campus compact multiactivité, 70 salles de formation, 2 grandes salles modulables, une salle plénière, une salle d’exposition de 450 m2, 270 chambres individuelles, un restaurant de 300 places, 4 salons privatifs, 1 bar lounge, une salle de fitness, une salle de détente, une médiathèque, une halle de formation technique de 3 000 m2, un parking de 450 places, un grand jardin, un terrain pédagogique de poteaux électriques en extérieur.
 



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    Son potentiel d’innovation et d’évolution fait du béton l’une des meilleures réponses aux défis technologiques de notre temps. Largement présent dans les enjeux architecturaux de l’époque, il nourrit également l’imaginaire des générations futures, comme le montre le succès de la 5e session du concours d’architecture Cimbéton.