Les berges du canal Saint-Denis à Aubervilliers, aménagées en béton sablé. (©Joseph Abdo/JA-Consulting)

Situation

Les berges du canal Saint-Denis s’étalent de Paris (19e arrondissement) à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Longues de 6,60 km, elles relient le rond-point des canaux, situé au niveau du parc de La Villette, à la Seine en aval. Elles traversent les communes d’Aubervilliers et de Saint-Denis.

Le chantier des secteurs 1 et 2, objet de ce reportage, se situe à Aubervilliers et concerne :

Secteur 1 : le quai Gambetta : entre la limite communale avec Paris et le pont de Stains – d’octobre 2022 à mars 2024 ;
Secteur 2 : le quai François-Mitterrand : entre la rue Heurtault et la rue Claude-Bernard – de septembre 2022 à août 2023.

Le secteur 3 qui n’est pas couvert par ce reportage se situe à Saint-Denis et concerne le bassin de la Maltournée.

État des lieux 

Le canal Saint-Denis a une double vocation :

• Une vocation industrielle très prononcée et ancienne, qui a entraîné la création de nombreux sites industriels sur ses berges ainsi que de plusieurs ports industriels. De ce fait, le transport de marchandises par bateau (principalement des matériaux pour le BTP) est important. 
• Une vocation touristique récente grâce à la navigation de bateaux de plaisance et de bateaux de transport de passagers qui desservent le Stade de France.

En outre, les abords du canal permettent de découvrir de nombreuses fresques de street artistes. Un parcours d’art urbain a été lancé en 2016 : il s’agit de la Street Art Avenue, véritable galerie d’art à ciel ouvert.

Si le canal a évolué dans sa vocation, les berges sont demeurées dans un piteux état, dégradées par les effets de l’âge et le manque d’entretien. Constitués d’une alternance hétérogène d’enrobés sombres, de gravats, de béton et de pavés, leurs revêtements étaient inadaptés pour les riverains et les usagers des lieux.

« Les berges semblaient figées dans le passé, en décalage par rapport à l’environnement immédiat qui évolue et qui se modernise. A plusieurs endroits, le revêtement était très ancien, maintes fois rafistolé et réparé, sa surface était constituée d’un mélange de matériaux divers tels que pavés, enrobés et béton », commente Benoit Louboutin, chef de projet/programmation et maîtrise d’ouvrage des espaces publics à Plaine Commune.

« L’état des berges souffrait d’un manque de cohérence global d’aménagement, d’absence de continuité des itinéraires pour les cyclistes et les piétons et d’absence de continuité de la trame verte et aussi de l’inexistence d’aires de détente et/ou de jeux », ajoute Anaëlle Levernier, cheffe de projet de l’Agence Gautier+Conquet Puma.

« Redynamiser ces berges, les rendre plus esthétiques et accueillantes, créer des zones dédiées et faire en sorte que cet espace soit plus verdoyant, tels étaient les premiers souhaits de Plaine Commune », précise Benoît Louboutin.

Les berges du canal Saint-Denis, sur la commune d’Aubervilliers, sont dans un état dégradé, qui rend impossibles la marche et la pratique du vélo. (©Joseph Abdo/JA-Consulting)

« Redynamiser ces berges, les rendre plus esthétiques et accueillantes, créer des zones dédiées et faire en sorte que cet espace soit plus verdoyant, tels étaient les premiers souhaits de Plaine Commune »

Projet

Le projet d’aménagement des berges du canal Saint-Denis a été conçu, étudié et planifié par une équipe de maîtres d’œuvre constituée d’Anaëlle Levernier pour la partie « Architecture et paysage », Cheffe de projet de l’Agence de paysagistes Gautier+Conquet Puma, et de Gérard Mabille, du bureau d’études VRD OGI. L’Agence Gautier+Conquet Puma a pris en charge la conception du projet, le principe d’aménagement et les esquisses du projet, les caractéristiques fonctionnelles du revêtement ainsi que le suivi du chantier. Le bureau d’études VRD « OGI », quant à lui, a défini les structures des revêtements en béton et en pavés, la portance du support ainsi que le plan de calepinage des joints du revêtement en béton en collaboration avec la paysagiste et a conçu les dispositions constructives à appliquer dans l’aménagement et en particulier au droit des interfaces entre les différents matériaux.

Objectifs de l’aménagement

Le projet s’est attaché à maintenir les fonctions historiques et industrielles de l’ouvrage (transport fluvial et adduction d’eau) et à les concilier avec des objectifs plus contemporains :

• Rétablir une continuité cyclable et piétonne ;
• Aménager des espaces de détente et des aires de jeux ;
• Améliorer la continuité écologique (refuge pour la biodiversité) ;
• Assurer une meilleure gestion des eaux par la création de noues ;
• Développer l’usage des mobilités douces et améliorer les déplacements quotidiens des habitants et des usagers ;
• Valoriser le patrimoine et les ressources en place (bassin, écluses, perrés, ouvrages de franchissement) ;
• Inscrire le canal dans la modernité (scénographie lumineuse soignée, design unitaire, relation aux espaces publics mitoyens, etc.).

 


Planning

Projet d'aménagement des berges du canal Saint-Denis

Études pré-op : 2010-2013. 
Études opérationnelles de maîtrise d’œuvre : 2013-2014. 
Travaux : 2014-2024. 

Le projet global a été réalisé en trois phases et les travaux ont démarré en 2014 sur la partie nord du canal, sise dans le département de Seine-Saint-Denis :

1re phase : de 2014 à 2017 ;
2e phase : de 2019 à 2021 ; 
3e phase : de septembre 2022 à mai 2024.


 

Contenu de l’aménagement

L’aménagement des berges du canal Saint-Denis est un projet de grande ampleur. Il a été réalisé en trois phases et a duré environ dix ans (de 2014 à 2024). Les travaux des secteurs 1 et 2 de la troisième phase, objet de cet article, ont été conduits en utilisant les mêmes produits et techniques que lors des phases précédentes.

La 3e phase a été découpée en trois secteurs, conformément aux indications figurant dans le tableau ci-après.

Le choix du béton dans l’aménagement des espaces publics

Le choix du béton s’est imposé avec évidence : il s’agissait d’une volonté conjointe de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre. « Les berges devant être réservées à la mobilité douce, l’aménagement ne pouvait pas être conçu comme une route », précise Benoît Louboutin. La réflexion menée par l’Agence Gautier + Conquet Puma a conduit à privilégier les matériaux de type minéral, dont la teinte est à dominante claire. « Cette réflexion s’est traduite par une conception associant deux types de matériaux : des pavés en pierre naturelle marquant les accès aux berges et un revêtement en béton qui longe les berges, interrompu par les accès en pavés », indique Anaëlle Levernier. 

En ce qui concerne le revêtement en béton, la maîtrise d’œuvre a défini et précisé les qualités des matériaux et les structures de chaussées afin que le revêtement soit en mesure de supporter à la fois le passage des usagers et les sollicitations dues aux conditions climatiques, telles que le gel, le produit de salage, la pluie, les inondations.

« Sur les plans esthétique et fonctionnel, il fallait un revêtement minéral conciliant trois caractéristiques essentielles, requises par la maîtrise d’ouvrage et par la maîtrise d’œuvre », ajoute Anaëlle Levernier. Ces trois caractéristiques sont :

• Un revêtement de couleur claire pour, d’une part, faire écho avec les trames vertes et avec les ouvrages du canal (quais, écluses, piles de ponts, etc.) et, d’autre part, tirer bénéfice de la clarté du revêtement (coefficient Albedo élevé) sur le plan de la réduction de l’îlot de chaleur urbain (ICU) et sur le plan de la réduction de la consommation énergétique de l’éclairage public. 
• Un revêtement clair, mais pas trop pour qu’il ne soit pas une source d’éblouissement, ce qui pourrait constituer une gêne mais aussi un danger pour les usagers, compte tenu de la proximité du canal.
• Un traitement de surface du matériau conférant au revêtement des caractéristiques de confort et une adhérence appropriée aux différents usagers des lieux. 

« Les berges devant être réservées à la mobilité douce, l’aménagement ne pouvait pas être conçu comme une route »

Le béton sablé a été préféré à d’autres techniques telles que le désactivé ou le bouchardé ou le stabilisé, car il permettait de réaliser facilement et à un coût compétitif deux aspects de surface différents sur le revêtement en béton (un béton sablé léger pour la partie réservée aux piétons et un béton sablé fort pour la piste cyclable), par simple modification de la pression du jet de sable.

Sur le plan de la durabilité, il fallait un béton qui présente des caractéristiques mécaniques adéquates et une formulation propre à garantir la tenue dans le temps du revêtement en fonction des sollicitations (piétons, vélos, trottinettes, skates, etc.) et des conditions climatiques (pluie, sécheresse, chaleur, gel, salage).

Pour tenir compte de toutes ces exigences et répondre aux spécifications du cahier des charges, Lafarge Bétons a été amenée à mettre au point une formulation spécifique pour ce chantier. En partant d’une formulation basique de béton, dont dispose la centrale, il a été procédé par ajustements successifs, en faisant varier les différents constituants (nature, couleur et dimension maximale des granulats ; nature et dosage du ciment ; nature et dosage du colorant ; nature et dosage des adjuvants) pour finalement converger vers un rendu conforme aux souhaits du maître d’ouvrage et du maître d’œuvre. 

« La mise au point du béton – par l’assemblage de sable et de gravillons bien sélectionnés, de couleur adaptée –, le choix de la teinte du ciment (ndlr CEM III) et l’adjonction d’un colorant orange précisément dosé, ont permis d’obtenir la nuance visée, évoluant du beige clair à la teinte orangée et répondant aux exigences esthétiques, fonctionnelles et de durabilité de l’aménagement », précise Anaëlle Levernier. 

« Nous avons réalisé plusieurs planches d’échantillons (50 x 45 cm) en partenariat avec Sols, afin de converger vers une teinte de béton et un agencement des granulats en surface (couleurs, proportions, taille, mosaïque) qui correspondent bien aux attentes de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre », précise Linda Mansuela, responsable régional (IDF) du développement des bétons spéciaux et environnementaux chez LafargeHolcim. 

« La mise au point du béton – par l’assemblage de sable et de gravillons bien sélectionnés, de couleur adaptée –, le choix de la teinte du ciment et l’adjonction d’un colorant orange précisément dosé, ont permis d’obtenir la nuance visée, évoluant du beige clair à la teinte orangée et répondant aux exigences esthétiques, fonctionnelles et de durabilité de l’aménagement »

Structures

Le choix du béton et le dimensionnement de la structure de la voirie ont été opérés afin de créer une assise solide, durable et homogène.

Structure des revêtements en béton sablé

En s’appuyant sur les guides et les normes en vigueur, le bureau d’études OGI a conçu et dimensionné la structure (épaisseur et caractéristiques) en fonction du trafic estimé à la mise en service (piétons, vélos, skates, véhicules et camionnettes d’entretien) et de la qualité du support en place (plate-forme support PF2). Deux structures ont été retenues : 

• Pour la voirie en béton sablé, avec deux intensités de sablage (sablage léger ou gommage pour la voie piétonne et sablage fort pour la piste cyclable) :
– Un revêtement en béton sablé, de classe BC3 (C25/30) et d’épaisseur 14 cm ; 
– Une couche de grave traitée au liant hydraulique routier (LHR), 0/20 et d’épaisseur 30 cm.
• Pour la voirie en pavés de pierre naturelle :
– Un revêtement en pavés, d’épaisseur 10 cm ; 
– Un lit de pose, d’épaisseur 4 cm ;
– Une couche de grave traitée au LHR, 0/20 et d’épaisseur 30 cm.

Coupe en travers-type pour la voirie en béton sablé avec deux intensités de sablage.
Coupe en travers-type pour la voirie en pavés de pierre naturelle.

La conception du revêtement en béton sablé

Les revêtements au sol, dédiés respectivement à la voie piétonne et à la piste cyclable, ont été conçus à l’identique et traités de la même manière, c’est-à-dire en faisant appel à la même formule de béton et au même procédé de mise en œuvre. Ils se sont différenciés par l’intensité du sablage au moment du traitement de surface. 

« Les deux surfaces étaient de niveau, produisant seulement une variation d’aspect au sol. Le béton sablé léger a été dédié à la voie piétonne et le béton sablé fort réservé à la piste cyclable », précise Anaëlle Levernier. 

Les revêtements en pavés de pierre naturelle, marquant, quant à eux, une transition et invitant par leur aspect à l’observation, ont été privilégiés dans les zones indiquant les différents accès aux berges.

« Les deux surfaces étaient de niveau, produisant seulement une variation d’aspect au sol. Le béton sablé léger a été dédié à la voie piétonne et le béton sablé fort réservé à la piste cyclable »

Approbation du projet 

Le projet complet de l’aménagement a été présenté pour validation au maître d’ouvrage et aux deux maîtres d’œuvre chargés de l’opération. Au total, 10 millions d’euros ont été investis dans les travaux, financés à 100 % par la Ville de Paris et Plaine Commune, pour rendre le site beaucoup plus accessible et attrayant. 

Au total, 10 millions d’euros ont été investis dans les travaux, financés à 100 % par la Ville de Paris et Plaine Commune, pour rendre le site beaucoup plus accessible et attrayant.

Réalisation des travaux des secteurs 1 et 2

Eurovia, entreprise en charge des secteurs 1 et 2 de la phase 3, a piloté le chantier en coordonnant les différents intervenants et en réalisant les opérations suivantes :
 
Démolition des revêtements existants en enrobés bitumineux et en béton, puis évacuation des matériaux ; 
• Enlèvement des revêtements en pavés existants, puis stockage sur site afin de les réutiliser dans le projet d’aménagement, après nettoyage et sciage ; 
• Travaux de terrassement pour mise à la cote du fond de forme, suivis d’un compactage soigné ; 
• Travaux d’assainissement et de drainage de la plate-forme pour gérer les eaux de ruissellement durant le chantier (mise en place d’ouvrages d’assainissement provisoires) ; réalisation de noues et travaux d’enfouissement de divers réseaux (à l’exception du réseau d’éclairage public) ;
• Travaux de génie civil (murs en pierre ; pose de bordures) ;
• Réalisation de la plate-forme support sous les différents revêtements ;
• Fabrication et mise en œuvre de la couche de fondation en grave traitée au LHR sous les différents revêtements ;
• Réalisation, le long du canal, des bordures de rive en béton coulé en place (de section transversale 70 x 20 cm x cm), pièces réalisées à l’aide d’une machine conçue et fabriquée dans les ateliers d’Eurovia ;
• Pose du revêtement en pavés de pierre naturelle.

Sols IDF s’est vu attribuer la mise en œuvre des revêtements en béton avec finition de type sablé (béton sablé léger pour le revêtement destiné aux piétons et béton sablé fort pour la piste cyclable), y compris les travaux préparatoires au bétonnage. 

Le chantier, des secteurs 1 et 2, totalisait 15 000 m2, dont : 

• Revêtement en béton sablé (voie piétonne et piste cyclable) : 8 000 m2
• Revêtement en pavés : 4 000 m2
• Aménagement des espaces verts : 3 000 m2

« Sur ce chantier, nous intervenons en deux temps (avec interruption des travaux entre septembre 2023 et février 2024) : de septembre 2022 à août 2023 ; puis de février à mai 2024. Jusqu’ici, les travaux se sont déroulés conformément au planning prévu », constate Gallien Ostino, ingénieur Travaux d’Eurovia.

Eurovia a tout mis en place pour que les travaux se passent dans de bonnes conditions de sécurité ainsi que de confort pour les riverains et les usagers des lieux, et dans le respect de l’environnement.

« Du fait que le chantier était en zone urbanisée, Plaine Commune a préparé, avant de démarrer les travaux d’aménagement, une campagne d’information sur le projet à destination des riverains, des commerçants et des usagers des lieux. L’entreprise Eurovia a été chargée de l’affichage de l’information et de la mise en place du balisage afin de protéger, d’une part, les riverains et les usagers et, d’autre part, le chantier (mobilier, arbres, bordures) et les revêtements en béton contre d’éventuelles dégradations pendant la période de durcissement », ajoute Gallien Ostino.

« Du fait que le chantier était en zone urbanisée, Plaine Commune a préparé, avant de démarrer les travaux d’aménagement, une campagne d’information sur le projet à destination des riverains, des commerçants et des usagers des lieux »

Réalisation de la plate-forme support 

Après avoir effectué les travaux de démolition et de terrassement, Eurovia a procédé à la mise à la cote du fond de forme, suivie d’un compactage soigné.

« L’objectif était de conférer à la plate-forme support de chaussée une portance minimale PF2 (50 ≤ EV2 < 80 MPa). Mais les mesures à la dynaplaque ont montré que les niveaux de portance étaient supérieurs à 80 MPa, plaçant ainsi la plate-forme support dans la classe PF2qs », précise Gallien Ostino.

Réalisation de la couche de fondation

Eurovia a procédé à la mise en œuvre, sur toute la surface à aménager, de la couche de fondation en grave traitée au LHR, d’épaisseur 30 cm. La grave traitée au LHR a été livrée par camion et déversée sur le fond de forme à l’aide d’une pelle mécanique. Elle a ensuite été régalée et compactée soigneusement à l’aide d’un compacteur tandem 4 tonnes. Cette opération de compactage est très importante, car elle vise à conférer à la grave traitée une compacité optimale en vue d’obtenir la classe mécanique exigée. La couche de fondation a été ensuite protégée par une émulsion de bitume.

Réalisation des revêtements en béton

Le chantier « béton » a été conduit par Sols IDF. Une fois réalisés les travaux de terrassement, le coulage des bordures de rive le long du canal et la pose des revêtements en pavés par Eurovia, les revêtements en béton, d’une superficie de 8 000 m2, sont créés en deux temps : de septembre 2022 à août 2023 et de février à mai 2024, en respectant le processus suivant : 

• Travaux préparatoires ; 
• Réalisation des coffrages, du chaînage autour des émergences et des joints de dilatation ;
• Fabrication et transport du béton ; 
• Réalisation du revêtement en béton, d’épaisseur 14 cm ; 
• Réalisation du calepinage des joints ; 
• Traitement de surface par sablage.

Travaux préparatoires 

Les travaux préparatoires ont consisté à protéger, par un film en polyéthylène, la bordure de rive (déjà mise en œuvre par Eurovia le long du canal), les espaces verts et, le cas échéant, les pavés en pierre naturelle.

Réalisation des coffrages, du chaînage autour des émergences et des joints de dilatation

Sols a eu recours à des coffrages en acier (règles de 3 m de long et de 10 à 12 cm de hauteur). Elle s’est aussi servie des bandes structurantes en pierre qui délimitent les bords des zones de pavage. « Une fois les coffrages posés et solidement fixés au sol à l’aide de fiches (de 18 mm de diamètre) réparties avec un espacement de 1 m, des voliges en bois ont été posées au niveau des jonctions, entre les règles successives pour assurer la stabilité du coffrage », explique Sébastien Vinatier, conducteur de travaux chez Sols IDF.

Autour de chaque émergence, il a été installé un chaînage de renforcement, confectionné avec un treillis soudé ST15C, afin d’empêcher l’ouverture des fissures susceptibles d’apparaître par suite de la réduction de la section transversale du béton du fait de la présence de l’émergence.

Des joints de dilatation en aluminium (deux lames d’épaisseur 2 mm), équipés d’ailettes, de 15 cm de hauteur et ayant un souffle de 1 cm (rempli de mousse et de silicone en surface), ont été installés suivant le rythme d’un joint tous les 30 m. Leur rôle est d’absorber la dilatation du revêtement qui se produit sous l’effet de l’augmentation de la température ambiante. 

Vue du chantier avant le coulage du béton, montrant la fondation en grave traitée au LHR, les coffrages posés, les bordures de rive et le pavage. (©Sébastien Vinatier/Sols)

Fabrication et transport du béton 

Pour ce chantier, la formulation retenue à l’issue de plusieurs tentatives et recherches était Artevia® Color 60 % Clair 40 % Noir CEM III Orange 2 kg FibS, dont les caractéristiques sont : BPS – NF EN 206/CN – BC3 (ou C25/30) – XF2 – S3 – Cl 1 – Dmax 14.

 Ce béton spécifique a été fabriqué avec les constituants suivants :

• Un sable 0/4 alluvionnaire semi-concassé silicocalcaire corrigé par un sablon 0/1 de même nature ; 
• Un gravillon 1 : 4/10 calcaire concassé, clair (60 %) ;
• Un gravillon 2 : 6/14 calcaire concassé, noir (40 %) ;
• Un ciment CEM III/A 42,5N PMES ; 
• De l’eau naturelle, conforme à la norme NF EN 1008 ;
Adjuvants : plastifiant réducteur d’eau + entraîneur d’air ;
• Un colorant orange dosé à 2 kg/m3 ;
• Des fibres en polypropylène, de longueur 12 mm.
 
Ce béton a été fabriqué à la centrale de Lafarge Bétons de Pantin, puis livré par camion-toupie. « La fourniture des 1 100 m3 de béton, s’est étalée sur une période longue de quinze mois. Le planning de livraison était fixé à la semaine, puis éventuellement ajusté la veille pour le lendemain, selon l’avancement du chantier et les conditions météorologiques », explique Linda Mansuela.

Avant qu’il ne soit livré, deux contrôles ont été réalisés immédiatement :

• Contrôle de la consistance du béton : il a été effectué à l’essai d’affaissement au cône d’Abrams et le résultat devait être de classe S3 (affaissement compris entre 10 et 14 cm) ; 
• Contrôle de la teneur en air occlus : il a été réalisé à l’aéromètre à béton et le résultat devait être obligatoirement compris dans la fourchette de 4 à 7 %.

Réalisation des revêtements en béton, d’épaisseur 14 cm

Le revêtement en béton a été réalisé parallèlement au canal avec un dévers minimal de 1,5 %, canalisant les eaux de ruissellement vers les espaces verts (à l’opposé du canal). Le béton a été livré à pied d’œuvre et déversé sur la couche de fondation directement par le camion-toupie. Il a été ensuite tiré à l’aide d’un râteau et réglé manuellement à l’aide d’une règle en aluminium, tout en respectant les repères altimétriques constitués, d’un côté, par les bordures de rive et, de l’autre côté, par des marques portées sur des piquets « repères ». Cette opération a été suivie par un lissage de la surface du matériau réalisé manuellement pour conférer au revêtement en béton un état de surface plan et d’aspect fermé (exempt de cavités ou de trous). « Cette opération a été réalisée par des applicateurs experts ayant chaussé des bottes spéciales, équipées de tiges de fer de 15 cm de hauteur  leur permettant de se déplacer dans le béton sans altérer l’uni du revêtement », précise Sébastien Vinatier.

Sitôt le lissage achevé, le revêtement en béton a été protégé contre la dessiccation par la pulvérisation d’un produit de cure (en deux couches successives) à l’aide d’un pulvérisateur électrique, moins polluant que le pulvérisateur thermique.

Réalisation du calepinage des joints

En plus des joints de dilatation installés avant le bétonnage, Sols IDF a réalisé des joints de retrait sciés dans le revêtement au bout d’un délai variant entre vingt-quatre et quarante-huit heures après le bétonnage, en fonction des conditions climatiques et de la température ambiante. Des joints de retrait transversaux ont été sciés sur le tiers supérieur du revêtement de la voie piétonne et de la piste cyclable en quinconce afin de se conformer aux exigences de la maîtrise d’œuvre. Cette disposition en quinconce présente un risque de voir apparaître des fissures dans le prolongement des joints de retrait transversaux. 

« Nous avons décidé, en accord avec la maîtrise d’œuvre, de scier le joint de retrait longitudinal sur toute la hauteur du revêtement afin d’empêcher l’apparition de fissures dans le prolongement des joints de retrait transversaux. Les joints de retrait sciés n’ont pas été scellés », ajoute Sébastien Vinatier.

Sciage du joint de retrait longitudinal sur toute la hauteur du revêtement et des joints de retrait transversaux en quinconce. (©Joseph Abdo/JA-Consulting)

Traitement de la surface par sablage

Dans un délai habituel d’environ trois semaines après le coulage, le béton a été sablé à sec au compresseur pneumatique. La poussière du béton produite et le sable ont été ramassés et évacués vers un centre de stockage, puis la surface a été rincée à grande eau jusqu’à l’obtention d’un parement homogène exempt de poussière.

Deux pressions de sablage ont été appliquées afin d’obtenir un gommage pour la voie piétonne et un aspect plus creusé pour la piste cyclable. 

« Ce travail a été mené par une équipe expérimentée, qui a réalisé le sablage en effectuant un mouvement régulier et constant afin d’obtenir un aspect de sablage homogène et de bonne qualité », conclut Sébastien Vinatier.

« Ce travail a été mené par une équipe expérimentée, qui a réalisé le sablage en effectuant un mouvement régulier et constant afin d’obtenir un aspect de sablage homogène et de bonne qualité »

Contrôle des bétons 

Pour atteindre une bonne qualité d’exécution, l’entreprise a choisi la méthode de mise en œuvre garantissant l’obtention d’une compacité conforme à celle de la formule de référence. Les contrôles des travaux se sont déroulés en deux étapes : 

Contrôles avant la mise en œuvre du béton :

• Contrôle des bons de livraison ; 
• Contrôle de la consistance du béton par l’essai d’affaissement au cône d’Abrams.

Contrôles durant la mise en œuvre du matériau :

• Mesure de l’épaisseur du revêtement en béton ;
• Contrôle visuel de l’aspect du revêtement.

Difficultés à surmonter

Comme pour tout projet urbain, il a fallu surmonter diverses difficultés lors de l’exécution du chantier. Mais, grâce à une bonne organisation et à une planification efficace des travaux, le chantier n’a pas été difficile à conduire malgré sa complexité et son ampleur, et ce pour plusieurs raisons. 

Première raison : malgré l’exiguïté des lieux et selon la volonté de Plaine Commune de maintenir les berges accessibles au public, Sols et Eurovia ont mis en place une organisation du chantier et un phasage précis. « La difficulté à résoudre a été de maintenir l’accessibilité du site pendant toute la durée des travaux. Nous avons donc adapté le mode de coulage pour tenir compte de cet environnement spécifique », précise Sébastien Thiercé, directeur de l’agence Sols IDF.

« Nous avons mis en place un phasage précis des travaux afin de satisfaire la demande du maître d’ouvrage, qui était de minimiser les gênes aux usagers et d’assurer leur protection. Pour maintenir l’accessibilité du site, nous avons délimité des zones de travail et créé un balisage pour guider les usagers », déclare Gallien Ostino.

« Mais attention, il faut bien protéger les zones fraîchement bétonnées pour empêcher toute intrusion, qui sera synonyme de dégradations. En effet, une zone du revêtement en béton a subi des dégradations provoquées par le passage de piétons, de vélos pendant la phase de durcissement du béton (durant les premières heures après la mise en place du béton). Ceci a entraîné la démolition de la zone dégradée et la reconstruction du revêtement », déclare Anaëlle Levernier.

Deuxième raison : bien qu’il soit complexe, morcelé, partagé, et qu’il fasse appel à beaucoup de matériaux urbains (béton, pierres naturelles, mobilier urbain, éclairage public, etc.) et à différents types de travaux (revêtements de voiries, pose de mobilier urbain, assainissement, végétalisation, signalisation, pavage, etc.), le chantier s’est déroulé sans problème grâce à une bonne coordination, une veille permanente et une rigueur de la part de tous les acteurs. « L’aménagement réalisé sur les berges était une opération complexe à mettre en place. Il a fallu une veille attentive et constante pour que les objectifs soient atteints », affirme Benoît Louboutin.

« La coexistence de plusieurs intervenants sur le site a nécessité de notre part un travail important de coordination, une veille permanente et attentive sur la qualité de la réalisation et une vigilance accrue sur les zones d’interface, en particulier », précise Anaëlle Levernier.

« Ce chantier, très morcelé dans le temps, nous a imposé une rigueur toute particulière. Il fallait que la formulation du béton soit utilisable dans les meilleures conditions, été comme hiver, et que le rendu esthétique soit au rendez-vous. En outre, le chantier exigeait une bonne organisation interne et une coordination efficace avec l’entreprise, notamment au niveau des livraisons », précise Linda Mansuela. 

Troisième raison : des dispositions efficaces prises lors de la fabrication du béton. 
« Il s’agissait d’une formulation spéciale. Au niveau de la centrale de béton et de manière à éviter toute contamination, il fallait s’assurer qu’il ne restait plus de fines dans les trémies, issues d’autres formulations », ajoute Linda Mansuela.

Satisfaction générale 

Les travaux des secteurs 2 et 3 de l’aménagement des berges du canal Saint-Denis ont été achevés en septembre 2023, à la satisfaction de Plaine Commune, des riverains, des usagers et de tous les intervenants. Le secteur 1 sera livré en mai 2024.

« L’aménagement réalisé est tout à fait conforme à nos attentes. Le rendu est très agréable et pratique. Les usagers sont satisfaits », affirme Benoît Louboutin. 

« Nous avons donné aux berges un attrait esthétique et de nouvelles fonctions écologiques et environnementales », résument de concert Gallien Ostino et Sébastien Vinatier. 

« Une fois l’aménagement achevé, une belle récompense pour nous autres, concepteurs, fut de voir les usagers s’approprier les berges », ajoute Anaëlle Levernier.

« Ce chantier est vraiment une très belle réussite, tant esthétique qu’environnementale, avec 8 000 m2 d’aménagement en béton sablé », conclut Linda Mansuela. 

Vue générale de l’aménagement des berges du canal Saint-Denis montrant les différents revêtements réalisés, les espaces verts ainsi que les zones de détente. (©Joseph Abdo/JA-Consulting)

Localiser la réalisation

Principaux intervenants

Maîtrise d’ouvrage : Etablissement Public Territorial Plaine Commune 

Maîtrise d’œuvre
• Architectes-paysagistes : Agence Gautier + Conquet Puma
• Bureau d’études VRD : OGI 
• Concepteur lumière : Scène Publique
• BET environnement : SOBERCO environnement 

Entreprises Lot VRD
• Eurovia : mandataire ; travaux de terrassement, de pavage et de génie civil 
• Sols IDF : sous-traitant pour la réalisation du revêtement en béton 
Fournisseurs 
• Lafarge Bétons : fournisseur du béton prêt à l’emploi 
• Lafarge Ciments : fournisseur du ciment

Chiffres clés

• Superficie des aménagements des secteurs 1 et 2 : 15 000 m²
• Superficie du revêtement en béton sablé : 8 000 m²
• Superficie du revêtement en pavés : 4 000 m²
• Superficie des espaces verts : 3 000 m²
• Volume de béton : 1 100 m3

Liens utiles

Plaine Commune
Cabinet Gautier+Conquet
Bureau d’études OGI
Eurovia
Sols
Lafarge Bétons
CIMbéton



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  • Metz (57)
    Une plateforme en béton pour un BHNS nommé Mettis
    À Metz, en matière de transports publics, Mettis a marqué un tournant. Mettis, c’est l’appellation des deux lignes de bus à haut niveau de service (BHNS), dont s’est dotée la communauté d’agglomération voici bientôt trois ans (voir Routes n° 124, juin 2013). D’une longueur totale de 17,8&nbsp;km, les deux lignes BHNS circulent en site propre. Elles ont priorité aux feux. La ligne A relie Woippy à Borny (axe nord-ouest – sud-est) et la ligne&nbsp;B couvre le trajet de l’île du Saulcy à l’hôpital de Mercy (axe nord-sud). Elles possèdent un tronc commun avec dix stations, dans le centre-ville.
  • REVUE
    Routes n°75
    Travaux et équipements routiers - Terrassements - Aménagements urbains - Aéroports
  • Généralités sur le fonctionnement des chaussées
    Avant d’aborder les questions spécifiques à la voirie et aux aménagements urbains en béton de ciment, il est utile de rappeler le fonctionnement d’une chaussée sur le plan général. Ceci permet de souligner les règles fondamentales pour la concevoir et la dimensionner, mais aussi les spécifications requises pour les matériaux routiers.