Pour la rénovation et la mise en valeur de la voirie du centre-ville, la mairie de Givry a opté pour une solution associant deux bétons désactivés, un béton bouchardé et un calepinage de zones faisant appel aux pavés de Buxy. Un choix qualitatif, innovant et respectueux de l’environnement, qui structure parfaitement l’espace urbain, tout en facilitant l’accessibilité aux usagers et en favorisant un meilleur cadre de vie un meilleur cadre de vie – et ce dans le respect du cachet historique de la commune.
Givry en Bourgogne
À 9 km à l’ouest de Chalon-sur-Saône, en Bourgogne du Sud, Givry, porte de la côte chalonnaise, est connue pour ses domaines viticoles (AOC reconnue en 1946), son dynamisme socioculturel et ses nombreux monuments classés ou inscrits. Commune rurale, chef-lieu de canton du département de Saône-et-Loire, adhérente à la communauté d’agglomération du Grand Chalon, Givry compte aujourd’hui environ 3 950 habitants. D’origine gallo-romaine, Givry devient village fortifié au Moyen Âge, protégé à l’époque par des remparts s’ouvrant aux quatre points cardinaux. Au XVIIIe siècle, Givry connaît une forte expansion grâce aux ressources que sont la forêt, le blé, la vigne… Les échevins décident de reconstruire l’hôtel de ville, ou porte de l’Horloge, à l’emplacement même de la porte Est. Émiland Gauthey et Thomas Dumorey en sont les architectes. C’est aujourd’hui un monument classé au titre des Monuments historiques, tout comme l’église Saint-Pierre-et-Saint-Paul, due, elle aussi, à Émiland Gauthey. Au fil du temps se sont ajoutés, au répertoire du patrimoine des Monuments historiques, d’autres édifices classés ou inscrits : Halle ronde, cellier aux Moines, croix, fontaines et lavoirs.
Objectifs de l’aménagement
« Le centre-ville de Givry avait trop vieilli, supportait de moins en moins le poids des années et était devenu inadapté pour les riverains et les usagers. Redynamiser le centre-bourg et le rendre plus esthétique, rendre accessibles le maximum de commerces, créer une zone partagée où le piéton est prioritaire et faire en sorte que les commerces prennent possession des trottoirs, tels étaient les souhaits de la mairie et de l’équipe municipale », commente le maire de Givry, Juliette Méténier-Dupont. Le problème est que Givry possède un cœur historique et une multitude de bâtiments classés. « L’objectif était donc de rénover la voirie du cœur de ville, sans dénaturer les lieux et en conservant le cachet de l’ancien », poursuit Mme le maire.
En 2015, pour répondre à ce besoin de modernisation, la municipalité a fait appel au cabinet d’architecture BYG Architecte et à l’Atelier Olivier Lesage, paysagiste, pour proposer une idée directrice et un projet de rénovation de la voirie du centre-ville. « L’existant, constitué d’une alternance hétérogène d’enrobés et de pavés sombres en pierre naturelle, était dégradé », commente Daniel Gauthey, directeur des services techniques de la ville de Givry.
Le projet
« Avant de nous décider et sur les recommandations du cabinet BYG Architecte et du cabinet Lesage, nous avons visité de belles réalisations de ce type dans les alentours et, en particulier, des chantiers réalisés en béton et en pierre ou dans un mariage des deux. Tout cela nous a convaincus. Notre choix a été évidemment guidé par des considérations d’ordre esthétique, par respect pour l’authenticité du lieu », ajoutent de concert Juliette Méténier-Dupont et Daniel Gauthey.
Le projet a été conçu, étudié et planifié par une équipe de maîtres d’œuvre, constituée de Philippe Guilloux, du cabinet BYG Architecte, d’Olivier Lesage, paysagiste concepteur DPLG de l’Atelier Olivier Lesage, de Franck Mounier du bureau d’études VRD Cosinus et de Dominique Sartori du cabinet de coordination Sardeic. Il a été aussi l’occasion de procéder à une modification du profil en travers de la chaussée de la rue de la République (avec un rehaussement moyen de l’ordre de 15 cm), à une remise à niveau générale des émergences des différents réseaux (eau potable et eau pluviale) et à l’enfouissement des réseaux.
Le choix du béton s’est imposé : il s’agissait d’une volonté conjointe de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre. Le centre-ville devant être essentiellement réservé aux piétons, il ne pouvait pas avoir un aspect routier, ce qui excluait les enrobés noirs. Esthétiquement, il fallait un revêtement de couleur claire, lequel a l’avantage de ne pas accumuler la chaleur, ce qui est intéressant du point de vue environnemental. Cela orientait le choix vers un revêtement en pavé local dit « pavé de Buxy » ou vers un béton décoratif. Mais l’entretien de l’espace urbain a guidé le choix vers un revêtement résistant, sans nécessiter la reprise régulière de joints. Finalement, le choix s’est porté sur un béton décoratif (associé ponctuellement avec des pavés de Buxy), les joints des pavés ne supportant pas l’action énergique d’une machine de nettoyage à haute pression.
« Notre projet s’attache à la fois à reformuler le fonctionnement des rues pour l’adapter aux piétons et les rendre plus accessibles aux personnes à mobilité réduite, mais aussi à retrouver une cohérence paysagère, et cela passe par les matériaux. La mise au point du béton par l’assemblage des agrégats et la teinte donnée au béton ont permis de restituer les nuances rose orangé allant parfois jusqu’au rouge plus soutenu de la pierre de Givry, que nous avons observé à travers le village », précise Olivier Lesage.
L’aménagement du centre-bourg de Givry est un projet de grande ampleur. Il sera réalisé en trois phases et durera trois années (de 2017 à 2019). Le chantier actuel en est la première phase et concerne l’hypercentre, principalement la rue de la République et la route de Beaune. En 2018, les travaux seront reconduits sur la place de la Poste, le parc Georges-Laporte et la place de l’Église, en utilisant les mêmes produits et techniques. La dernière phase aura lieu en 2019 et concernera la place d’Armes.
Phase 1 : une idée innovante qui a lentement fait son chemin
L’objectif principal est de redynamiser le centre-bourg, tout en rendant accessibles le maximum de commerces, de créer une zone partagée où le piéton est prioritaire, en veillant à l’intégrer dans l’architecture des lieux.
Les travaux comprenaient la rénovation des trottoirs de la route de Beaune (en béton désactivé et bordures de trottoirs en produits préfabriqués en béton flammé) et la réfection de la voirie de la rue de la République (en béton désactivé pour la voirie et les zones piétonnes et en béton bouchardé pour le stationnement).
Le pari est réussi grâce à une idée originale et innovante :
- Passer du noir (enrobé et pierre sombre) à un matériau clair et esthétique (béton désactivé et bouchardé).
- Choix d’un béton teinté pour s’harmoniser avec la pierre des façades.
- Conception originale du profil en travers de la rue de la République : rehausser le niveau de la rue afin de rendre accessible la majorité des commerces et des entrées d’immeuble ; mettre au même niveau la chaussée et les trottoirs ; canaliser les eaux, les collecter au milieu de la chaussée et les évacuer par un caniveau à fente ; différencier les zones (piétonnes, voiries, stationnement) par un traitement approprié du béton (désactivé pour la chaussée ; bouchardé pour le stationnement et désactivé pour les zones piétonnes). Quid des émergences (adaptation, rehaussement, etc.) ?
- Faire appel à un concept innovant pour la structure de la chaussée : il s’agit du concept de chaussée composite « béton-bitume », associant les qualités du béton en surface (moulabilité, rigidité, indéformabilité, durabilité, esthétique, etc.) à celles des produits bitumineux en fondation (souplesse, déformabilité, absence de retrait, etc.). Cette structure bénéficie aussi d’une bonne adhérence-collage à l’interface béton-bitume, ce qui permet d’optimiser l’épaisseur de la structure et de réduire la consommation des matériaux nobles.
- Transformer la rue de la République en plateau surélevé pour inciter les automobilistes à ralentir et créer ainsi une zone partagée où le piéton est prioritaire, en invitant les commerces à prendre possession des trottoirs.
De plus, cette solution technique est respectueuse du principe de développement durable :
- Réduction de l’effet d’îlot de chaleur urbain et de la consommation d’énergie de l’éclairage public par le choix d’un matériau clair.
- Intégration au bâti environnant par le choix de la teinte du béton (granulats, sable et colorant), dont l’aspect final s’harmonise avec la couleur naturelle de la pierre utilisée dans la construction des façades et des bâtis qui longent l’aménagement.
Structures
La structure retenue par le bureau d’études Cosinus pour la voirie circulée de la rue de la République est composite et innovante. Elle a fait ses preuves en matière de performances et de durabilité, en combinant une couche de fondation en grave-bitume et une couche de roulement en béton de ciment. Elle a été établie en fonction du trafic estimé à la mise en service (1 000 à 1 500 Véh/j, dont 10 PL/j) et de la qualité du support en place (plate-forme support PF2).
Pour cette première phase, le dimensionnement des structures s’établit comme suit :
Trottoir de la route de Beaune : 13 cm de béton sur une couche de tout-venant.
Rue de la République :
- Chaussée : 20 cm de béton fibré sur 13 cm de GB3 sur une plate-forme support de portance PF2.
- Trottoir : Si stationnement : idem à la chaussée. Si pas de stationnement : 13 cm de béton sur du tout-venant.
Réalisation
Le chantier a été confié au groupement d’entreprises Guinot TP, Id Verde et Sols-Bourgogne.
La mise en œuvre du béton a été assurée par Sols-Bourgogne, spécialiste du béton décoratif.
La fabrication du béton a été confiée à la centrale de Chalon-sur-Saône de la société Unibéton. « Nous sommes intervenus entre mai et septembre 2017 », constate Sébastien Thierce, président SAS de Sols-Bourgogne. Plusieurs planches d’essais ont été réalisées afin de trouver la bonne teinte et le bon rendu (pour le béton de la rue de la République) ainsi que la bonne profondeur de désactivation pour les bétons désactivés de la route de Beaune et de la rue de la République.
Les travaux de mise en œuvre se sont déroulés en respectant l’ordre des opérations suivantes :
- Terrassements et démolition.
- Plate-forme support PF2.
- Mise en place du caniveau à fente central.
- Réalisation de la couche en grave-bitume (de 13 cm) épaulant le caniveau à fente central (de part et d’autre du caniveau) pour la fondation de la chaussée circulée et des trottoirs (zone de stationnement).
- Mise en place des chaînettes matérialisant les limites de la chaussée circulée.
- Mise à niveau des trottoirs (absence de stationnement) en tout-venant.
- Mise en œuvre du béton sur la partie de trottoirs (absence de stationnement).
- Mise en œuvre du béton sur la chaussée circulée et sur les zones des trottoirs avec stationnement.
Dans tous les cas, les bétons de consistance S3 (Slump égal à 12 cm) ont été mis en œuvre manuellement à la règle sans vibration.
En fonction de la zone visée, le traitement de surface est soit la désactivation, soit le bouchardage.
Des difficultés à surmonter
Comme pour tout projet urbain, il a fallu surmonter plusieurs difficultés lors de l’exécution du chantier.
Première difficulté : l’exiguïté des lieux et la concentration de résidents sur un périmètre limité.
« La difficulté à résoudre a été de maintenir l’accessibilité des commerces et des habitations pendant toute la durée des travaux », précise Daniel Gauthey. « Il a fallu adapter le mode de coulage pour tenir compte de cet environnement spécifique : un phasage précis des travaux minimisant les gênes aux usagers et aux riverains et l’installation de rampes d’accès provisoire aux habitations et aux commerces. Sur certaines zones, nous avons dû venir une première fois pour travailler d’un côté et laisser l’accès aux piétons… Et revenir ensuite pour réaliser le reste. Du coup, la cadence était assez faible. Également, par manque de place, nous avons dû faire beaucoup de choses à la main ou utiliser de petits engins », enchaîne Sébastien Thierce.
Deuxième difficulté : Gérer la circulation dans le centre-bourg. Daniel Gauthey explique « Cette difficulté a été surmontée par un phasage précis des travaux (tranches de rue à rue), par la mise en place d’une déviation et par la mise à disposition de zones de stationnement tout autour du centre-bourg », précisent Daniel Gauthey et Sébastien Thierce.
Troisième difficulté : les aléas climatiques, liés à l’étalement dans le temps du chantier.
« De mi-mai à mi-octobre, nous avons réalisé dix semaines d’intervention (une semaine en mai ; trois semaines en juin ; deux semaines en juillet ; une semaine en août et trois semaines de bouchardage) sur des surfaces très variables, mais en restant toujours dans les délais », se rappelle Sébastien Thierce.
Satisfaction générale
Fin 2017, la commune de Givry a inauguré officiellement la première tranche de la rénovation du centre-ville. « Les riverains sont satisfaits. Nous avons rendu à Givry un centre-ville convivial et généreux », résument ensemble Juliette Méténier-Dupont et Daniel Gauthey.
« Une belle récompense, pour nous concepteurs, fut de voir, aux beaux jours, une fois le béton achevé, les anciens descendre de leur fauteuil et s’approprier leur pas de porte pour discuter avec les passants. La rue est redevenue un espace de vie », conclut Olivier Lesage.
« L’aménagement réalisé sur la rue de la République et sur la route de Beaune est tout à fait conforme à nos attentes. Le rendu est très agréable et très pratique, affirme Mme le maire de Givry. Ce qui nous pose question est le fait de savoir comment préserver la qualité des surfaces en béton par une gestion appropriée de la circulation. »
Nous attendons avec impatience la deuxième phase du projet d’aménagement, prévue en 2018.
Chiffres clés
Surface en béton réalisée pour la première tranche : 3 500 m² dont
- Béton bouchardé : 1 200 m²
- Béton désactivé de la route de Beaune : 1 000 m²
- Béton désactivé de la rue de la République : 1 300 m²
Principaux intervenants
Maîtrise d’ouvrage : Mairie de Givry - Maîtrise d’œuvre : Cabinet BYG Architecte, Atelier Olivier Lesage (paysagiste concepteur DPLG), Cosinus (bureau d’études VRD économiste) - Entreprises : Guinot TP, Id Verde, Sols-Bourgogne - Entreprise de réalisation des bétons décoratifs : Sols-Bourgogne - Fournisseur du béton : Unibéton - Fournisseur du ciment : Ciments-Calcia