La qualité de la teinte d’un parement ne résulte pas de l’application de recettes simples. Elle repose sur la maîtrise d’un ensemble de paramètres liés à la formulation du béton (régularité des matières premières utilisées, précision des dosages), à sa fabrication et sa mise en œuvre (bétonnage, vibration), aux caractéristiques du coffrage, de la peau coffrante et du produit démoulant, et aux conditions climatiques et météorologiques (température, humidité) lors de la réalisation de l’ouvrage et les jours suivants. Le respect des normes en vigueur est une condition nécessaire mais pas suffisante à l’obtention de parements de qualité.
Les constituants du béton
La teinte des bétons est apportée par celle de leurs constituants, elle peut varier du gris aux couleurs les plus soutenues ou les plus pastel et à l'inverse aller jusqu'au blanc le plus lumineux.
En sélectionnant les constituants en conformité avec les normes en vigueur (sables, granulats, ciments gris ou ciments blancs et pigments), on obtient une palette quasi illimitée de couleurs : jaune, ocre, rouge, brun, marron, noir, vert, bleu… et de combinaisons de teintes. Il est cependant beaucoup plus facile de colorer un ciment blanc qu’un ciment gris, surtout si l’on souhaite obtenir des bétons de couleurs vives.
La teinte des bétons bruts de démoulage est essentiellement influencée par les constituants les plus fins du béton :
- ciment
- fines du sable
- fines correctrices (fillers, cendres volantes)
- particules ultrafines (fumée de silice par exemple)
- pigments
La teinte des bétons traités est fonction principalement de la couleur des gros granulats tels que les gros grains de sable et les gravillons.
Les ciments
Les bétons peuvent être confectionnés avec du ciment gris ou du ciment blanc. Le choix de la teinte du ciment est guidé par le type de parement à réaliser et la teinte finale recherchée.
- Si le ciment est gris, il définit une teinte de base du béton.
- S’il est blanc, il prend la couleur de ses autres constituants tels que les sables ou les granulats.
Les ciments doivent être conformes à la norme NF en 197-1 (norme qui définit principalement les différents types de ciment, les constituants, les classes de résistance, les caractéristiques physiques chimiques et les valeurs limites garanties).
Le ciment utilisé doit être adapté aux classes d'exposition auxquelles l'ouvrage est exposé et aux conditions d'exécution (température, délais de démoulage …).
- Le ciment gris peut, selon son origine, apporter aux bétons des teintes plus ou moins claires. La teinte naturelle du ciment dont la couleur peut varier du blanc pur au gris soutenu est dûe aux minéraux de base contenus dans ses matières premières.
- Le ciment blanc a une composition et des performances mécaniques analogues à celles des ciments gris. Il est utilisé pour réaliser les bétons blancs et en général les bétons colorés (en utilisant des pigments de coloration) ou les bétons clairs, voire très clairs (en utilisant des granulats de teinte claire, sables naturels de couleur beige, ocre, rose…). Il met en valeur les sables et les granulats utilisés. La blancheur des ciments blancs est due à la réduction maximale des minéraux colorants (oxydes métalliques, etc.) dans les matières premières utilisées et à un process de fabrication spécifique.
Les sables et les fines
Les aspects des parements en béton sont directement liés aux conditions de développement de la zone de peau correspondant à l’interface béton-coffrage.
Les caractéristiques physico-chimiques de cette zone particulière sont essentiellement gouvernées par la quantité, la nature et l’homogénéité de répartition des éléments fins qui vont la constituer. Ce sont donc les éléments les plus fins (fines et sables d'un diamètre inférieur à 0,3mm) qui vont déterminer avec le ciment la teinte de fond des bétons.
Les sables et les fines ont une influence déterminante sur la teinte finale du béton brut de décoffrage. Leur régularité doit faire l’objet d’un soin particulier. La couleur du sable est d’autant plus déterminante pour celle du béton que le ciment est clair.
Les pigments de coloration
Les pigments sont des superfines (0,1 à 1 mm) utilisées dans le but de modifier la teinte du béton dans lequel elles sont dispersées.
Ce sont :
- soit des pigments de synthèse,
- soit des pigments naturels, issus d'oxydes métalliques naturels : fer (rouge, jaune, ocre), chrome (vert), titane (blanc), manganèse.
Ils se présentent soit sous forme liquide (en suspension dans l’eau), soit en poudre.
Ils sont ajoutés en faible quantité dans le béton. Leur dosage, exprimé en pourcentage du poids du ciment, est compris :
- entre 0,5 % et 2 % pour les teintes pastel ou claires
- entre 2 % et 5 % pour les teintes vives.
Selon le résultat recherché ils sont associés avec du ciment blanc ou du ciment gris.
Les pigments de coloration sont associés de préférence avec des sables et des granulats de même couleur. Il est possible de les combiner pour obtenir des teintes intermédiaires. Leur emploi est quasiment indispensable lorsque l'on souhaite obtenir des bétons de teinte soutenue (par exemple rouge, brun, noir, bleu ou vert).
TABLEAU / Couleurs des principaux pigments
Les granulats
Les granulats contribuent aussi à la teinte des parements. Ils sont mis en valeur en fonction du traitement de surface appliqué.
Tous les granulats utilisés doivent être conformes aux normes NF P 18-545 et NF EN 12620. On utilise indifféremment en fonction des disponibilités et de l’aspect recherché des granulats roulés, concassés ou semi-concassés.
Les sables et les gravillons sont disponibles dans une large variété de teinte naturelle (cette teinte doit être uniforme et régulière pour la réalisation de parements fins ou ouvragés).
La teinte des bétons ayant subi un traitement de surface (béton lavé, béton désactivé, béton bouchardé, béton poli) est liée à la couleur des gravillons et des gros grains de sable.
La teinte du mortier peut s'harmoniser avec celle des granulats ou au contraire créer un contraste faisant ressortir la couleur des gravillons. Le traitement de surface peut aussi faire apparaître de façon plus ou moins marquée, la teinte des grains fins du sable ou celle des gros grains.
La taille et la forme des granulats ont un impact déterminant sur la texture des bétons traités. La granulométrie doit donc être compatible avec l’aspect recherché. La dureté des granulats doit être adaptée au traitement de surface éventuellement appliqué. En règle générale, pour les bétons bruts de décoffrage, la dimension maximale des granulats ne devra pas dépasser 25 mm pour les bétons à traiter, la granulométrie sera fonction de l’aspect de surface recherché, de la densité et de la dimension des armatures, de l’épaisseur du parement et de la résistance mécanique nécessaire.
Le choix de leurs caractéristiques (roulés ou concassés, teinte, dimensions) est donc déterminé par l’ensemble des contraintes mécaniques, physico-chimiques et esthétiques. Les diverses techniques de traitement de surface des parements permettent de mettre en valeur le grain et la couleur des granulats.
TABLEAU / Teinte des granulats en fonction de leur nature minéralogique
La dureté des granulats doit être adaptée aux traitements de surface.
Suivant leur origine les gravillons offrent différentes qualités :
- Calcaire (marbres, pierres marbrières) : bonne adaptation aux traitements par grésage ou polissage ;
- Siliceux (quartz, quartzites) : bonne résistance à l’abrasion ;
- Éruptifs et métamorphiques (basaltes, granits, diorites, porphyres) : très grande variété de coloration.
La combinaison de granulats de teintes différentes ou complémentaires au sein d’une même composition de béton permet d’obtenir :
- Des effets granités ou mouchetés ;
- Des veinages ou autres effets spéciaux résultant d’une mixité de deux ou trois bétons de teintes différents ;
- Des dessins géométriques par la juxtaposition de bétons de teintes différentes sur une même surface (par moulage simultané) ;
- Des reliefs de couleurs différentes, obtenus également par moulage simultané.
VIDEO : Le béton coloré
La formulation des bétons
La formulation des bétons influe directement sur ses performances mécaniques mais aussi sur la qualité et la teinte des parements.
La teinte des bétons peut varier en fonction de nombreux paramètres de formulation en particulier :
- La teneur en eau (e/c du béton) : plus ce rapport est élevé, plus le béton s’éclaircit (toute variation du e/c entraîne une variation de la teinte du béton)
- Le rapport g/s,
- La teneur en éléments fins (éléments inférieurs à 80 μm), les éléments fins ont une influence importante sur la structure de la peau du béton et donc sur sa teinte.
- Le dosage et la finesse du ciment.
La formulation du béton fait souvent appel à des adjuvants. Il convient de s’assurer que leur utilisation et que leur impact sur la rhéologie du béton n’influence pas la teinte finale du béton.
La fabrication et la mise en œuvre des bétons
La teinte des bétons peut varier aussi en fonction de la régularité de leur fabrication et de leur mise en œuvre, ainsi que des conditions climatiques (température, hygrométrie) lors des premières heures suivant le décoffrage.
Le malaxage du béton doit être exécuté toujours dans les mêmes conditions.
Nota : si l’on utilise des pigments en poudre, il convient de les malaxer préalablement avec les granulats, ajouter le ciment puis malaxer à nouveau et ajouter l’eau. Les pigments sous forme liquide doivent être introduits en même temps que l’eau de gâchage.
La vibration du béton au sein du coffrage a aussi une influence sur la teinte.
Les conditions de maturation
De nombreuses études ont mis en évidence l’existence d’une corrélation entre les conditions de maturation du béton de peau et sa teinte.
De nombreux paramètres interviennent sur les conditions de maturation du béton :
- La température du béton,
- La température extérieure,
- L’hygrométrie ambiante,
- La ventilation,
- L’échéance de décoffrage.
Décoffrage
La teinte définitive du béton est directement influencée par la durée pendant laquelle il est resté sans contact avec l’air (c'est-à-dire dans le coffrage).
Les variations hygrométriques peuvent aussi avoir une influence sur la teinte. C’est la raison pour laquelle on utilise couramment des agents de démoulage. Les uns sont des films qui restent sur le coffrage, les autres dits « pelables », restent sur le béton et sont détachés par la suite.
Constituant un écran entre le béton et l’air ambiant, ils réduisent l’évaporation de l’eau excédentaire : la réaction hydraulique reste normale dans n’importe quelles conditions extérieures. Le choix se portera systématiquement sur les produits qui ne risquent pas de tacher la surface du béton.
Le décoffrage doit être effectué selon des conditions de maturité constante.
Le temps nécessaire entre le coulage et le décoffrage varie en fonction de la géométrie du parement, de la composition du béton et de la température extérieure.
Le degré d’avancement du durcissement du béton lors du décoffrage conditionne les échanges entre le parement et l’extérieur, et à terme l’évolution de son aspect. Le décoffrage doit donc être effectué dans des conditions de maturité constante dès que le béton a atteint une résistance adéquate et lorsque la maturité du béton est suffisante afin de réduire au minimum les échanges hydriques entre le béton et le milieu extérieur.
Cure du béton
Pour obtenir les propriétés mécaniques et l’aspect de surface recherchés, le béton doit durcir dans de bonnes conditions. Après décoffrage, la surface doit être protégée contre la dessiccation (déshydratation du béton en surface) par un traitement de cure qui permet de maintenir dans le béton l’eau nécessaire à l’hydratation du ciment.
La dessiccation accentue les phénomènes de retrait ou de fluage, voire des efflorescences (concrétions blanchâtres de carbonate de calcium), et par conséquent risque d’altérer la qualité du parement.
La cure désigne les conditions ou les traitements appliqués au béton pour éviter le départ prématuré (ou excessif) de l’eau qu’il contient. Elle est appliquée immédiatement après coulage du béton sur les surfaces non coffrées
Elle est obligatoire et doit être renforcée par temps chaud ou venteux ou lorsque le degré d’humidité de l’air est faible.
La cure permet de maintenir l’eau nécessaire à l’hydratation du ciment, particulièrement dans les zones de surface où la dessiccation peut se produire de façon préférentielle et donc d’éviter certains phénomènes de fissuration, en particulier ceux liés au retrait précoce sur le béton frais (retrait plastique) et sur le béton durci (faïençage).
La cure, dont la durée de cure peut varier de 24 heures à plusieurs jours selon les conditions climatiques, est nécessaire pour obtenir des performances élevées en peau des bétons. Elle doit faire l’objet d’essais permettant de vérifier qu’elle n’a pas d’incidence sur la teinte du parement.
La méthode de cure mise en œuvre (produits de cure, feuilles de polyane, géotextile humide, pulvérisation d’eau…) peut influencer aussi la qualité du parement. Il convient de déterminer avec précision le délai de maintien de la cure nécessaire en fonction de la méthode de cure adoptée
Principales recommandations
Trois grandes familles de paramètres influencent les qualités d’aspect des parements :
- Les paramètres de formulation,
- Les paramètres de mise en œuvre,
- Les paramètres de maturation et de décoffrage